Immersion en plein soleil

Joseph-Ferdinand Cheval (1836-1924), facteur de son état passa plus de trente ans de sa vie à l’édification de son Palais idéal sur la commune d'Hauterives en  Drôme du Sud. Nadine Monfils raconte cette utopie qu’Alain Leempoel représente aux quatre vents.

Joué le matin à 11H, sous le cèdre du jardin Saint Claire, Le Facteur Cheval ou le rêve d’un fou affronte l’été avignonnais, entre montées caniculaires et rafales de Mistral. Le plein air en plein jour relève de la volonté du metteur en scène Alain Leempoel, désireux de confronter acteurs (et spectateurs) à l’âpreté de l’écosystème provençal. Moustache, képi, redingote, sacoche en bandoulière, Elliot Jenicot, impeccable, infatigable, incarne ce fonctionnaire taciturne qui, suite à un chute, tomba en amour pour des galets avec lesquels il érigea sa bâtisse mirifique.

On cache la misère en brodant des contes par dessus.

Cheval cautionne ainsi ce chantier démentiel qui mobilisa une large partie de sa vie (33 années de travaux pour 86 ans d’existence). La palais du facteur figure à la fois un monument de fantaisie créative et un rempart contre le chagrin, inséparable de cet homme qui survécut à deux épouses et ses deux enfants.

Dans son dernier tiers, le récit oblique vers le conte, le subterfuge romanesque accentue encore la puissance de l’imaginaire face aux abrasions mélancoliques.

La fatigue est le manteau de l’ennui.

L’homme se jette à corps perdu dans les maçonneries du palais, puis de son tombeau. La fuite en avant se concrétise par l’érection d’un échafaudage en branchage et bois flotté, assemblé par le plasticien Philippe Doutrelepont.

Décidément, en ce mois de juillet, personne ne ménage sa peine dans le jardin Sainte Claire.

Le Facteur Cheval ou le rêve d’un fou: 11H, Théâtre des Halles, jusqu’au 30 juillet (relâche le mercredi).

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