Onze ans après le succès de L’Inconnu du lac, Alain Guiraudie renoue avec le récit criminel
Saint-Martial, un village quelque part entre le Mont Aigoual, Millau et le Causse Méjean, Jérémie (Felix Kysyl) revient de la ville pour les funérailles du boulanger dont il fut le mitron. Sur place, Martine, son ex-patronne (Catherine Frot), lui propose de se remettre au pétrin. Dans l’attente de sa réponse, elle lui offre un lit, au grand dam de son fils Vincent (Jean-Baptiste Durand).
Durant sa réflexion, rythmée par les cueillettes de champignons, le transfuge retrouve Walter l’ermite rétif (David Ayala). Il croise encore un prêtre adepte des balades en forêt. Interprété tout en litote par l’étonnant Jacques Develay, l’insolite homme d’église, confirme l’esprit du projet.
Avec ce nouvel opus, Guiraudie se pique de sacré et se frotte au sacrilège. L’hédoniste du terroir ausculte une communauté en déshérence, au sein de laquelle, si rien ne se dit, tout se devine. Ainsi lorsque Vincent disparaît, un doute s’installe, un désarroi s’immisce, peu à peu supplantés par des desseins aussi furtifs qu'inattendus.
Dans l’âpre et sublime humidité des automnes cévenols, par les ruelles d’une commune promise au silence, s’articule un drôle de drame.
Espiègle et droit dans ses bottes (de cantonnier), Guiraudie livre une cartographie des désirs qui baguenaude entre les registres, les élégances et le bon droit. L'ambiance poisseuse de l’ouverture cède la place à une intrication dangereuse, truffée d’intempestifs et pittoresques sous-entendus.
Copieusement arrosé par la pluie, quelques grains de chevrotine et de solides ballons d’absinthe, Miséricorde s’assimile à une comédie de Folk Horror : confert The Wicker Man (Robin Hardy 1974) où, débarqué sur une île, un enquêteur met à jour des intérêts aussi curieux que bien compris.
Miséricorde : pitié qui pousse à pardonner à un coupable.
Miséricorde : attribut de Dieu qui explique son dessein du salut de l'humanité.
Extraites du Larousse, les acceptions résument l'humeur iconoclaste de ce conte rural qui délivre, en prime, le sacrement de confession le plus sidérant jamais filmé.
Tel est pris qui croyait s’éprendre et au Seigneur de retrouver ses brebis.
Photographies : Les Films du Losange.