Tapis rouge et mini bar

Cet été au Théâtre des Carmes, il y a un tapis rouge à fouler et même quelques marches à monter. Pensionnaire du lieu, Michel Bruzat revient avec Daniel Pennac et son Merci dans son bagage.

Échappée d’une pièce de Labiche ou d’un dessin de Sempé, une dame coupe le ruban qui la sépare d’un trophée bien mérité. Il lui reste à remercier. Vanité tapie sous une ’émotion ostentatoire, délectation des fans éventuels, aigreur bien comprise des envieux.., le discours et ses apartés livrent un panorama abrasif des remises de prix ou de décoration.

Frappée du sceau du vécu, la charge s’attarde sur les coulisses : la lauréate, seule dans sa chambre d’hôtel face à la lumière intérieure du mini bar. Elle sacrifierait toutes les effusions pour la magie pour un instant d'intimité vagabonde, lorsqu’une idée innerve une pensée, lorsqu’un texte s’offre à son interprète. Elle ravive cette solitude délicieuse comme d’autres mordent dans une madeleine.

Remercier ou être remercié ? La nuance peut être de taille et les affects des plus contrastés. Doit-on se montrer redevable à un enseignant dont l’imbécilité a construit votre rancœur, forgé votre caractère et, à l’arrivée, nourri votre inspiration ? Daniel Pennac, par ailleurs auteur de Chagrin d’école (Prix Renaudot 2007), hasarde la question.

Celle ci est posée par Flavie Edel Jaume. Vue à Avignon dans La Putain respectueuse, mis en scène en 2017 par Gérard Gélas, la comédienne reprend sa compagnonnage avec Michel Bruzat. Avec son trophée chromé et sa robe en taffetas, elle égratigne avec véhémence ou se confie dans un murmure, tout au long d’un protocole où l’esprit se pare d’un masque, voire un nez rouge pour affronter sain et sauf les arrières pensées de certains vins d'honneur.

On applaudit et bien sur on lui dit merci.

Merci,  du 7 au 26 juillet, 11H55, Théâtre des Carmes Avignon (relâche les mercredis).

http://www.theatredescarmes.com/

Photographies: Franck Ronciere.

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