Pater Noster

Entouré de caissons lumineux, un homme semble en interrogatoire. Pourtant il vient de prendre 30 ans. Pourquoi ? Comment ? Il va livrer tenants et aboutissants.

A la base une famille en voie de décomposition : une mère entreprenante, une winneuse, plus du tout en osmose avec un père calfeutré dans ses routines. Le gosse lui, s’échappe dans sa chambre, via les claviers, casques et télécommandes.

A la séparation, le fils choisit le Pater à la Femelle. Il lie connaissance avec Bertrand, qui tape l’incruste, depuis que la dépression du père l’a ramené à la maison.

Fort en gueule, féru d’armes à feu et de saillies sexistes, le gaillard devient le mentor du lycéen, qui se fond dans ses visions virilistes, jusqu’en adopter ses éléments de langage.

En tee-shirt, jean, basket, Guillaume Cantillon débarque au plateau. Sous des lumières inquisitrices, il s’approprie cette parole testostéronée, aussi simpliste que conquérante. Et on connaît le soucis passionné du fondateur du Cabinet de curiosités, pour la langue et ses multiples circonvolutions et métamorphoses. 

Mort le soleil résulte d’une commande adressée par l’acteur-metteur en scène à Gwendoline Soublin.

Les massacres de masse, la propagation des courants masculinistes, l’émergence du mouvement #metoo, les questionnements intimes d’un père pour son fils de 14 ans; ses préoccupations Guillaume Cantillon les a partagés avec cette autrice de poèmes dramatiques et de partitions jeune public.

Suite au verdict qui ouvre le spectacle, rien n’est expliqué, tout s'écoute, se devine, se comprend. Mort le soleil relève de la confession-récit, dans laquelle le carrousel des expressions, le ressassement des phrases, traduisent la contamination d’un esprit à la dérive.

A la fureur des mots s’agrège la vitalité de l’interprète, qui trace sa route, garde la cap et capte l’attention, tout au long de cette contrition à la fois ardente et minutieuse.

Ponctué par les feulements de Nicoletta, Mort le soleil, se suit comme un thriller, s’instille comme un documentaire, s’encaisse comme un gâchis et fermente comme une mise en garde, sans s'écarter du chemin d’une éventuelle rédemption.

Tétanisant et magistral.

Théâtre Transversal, 18H50, jusqu'au 25 juillet (relâche le mercredi)

https://theatretransversal.com/

 

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