A l’origine de Cicatriciel, il y a un enfant intersexué. Il devait se nommer Augustin, on l’appellera Vincent, du nom de l’hôpital Saint Vincent où sa mère vient d’accoucher. De toute façon, l’espérance de vie du nourrisson est limitée.
37 ans plus tard Sarita Vincent Guillot est toujours de ce monde. Une peine amoureuse, le confinement participent à la naissance de Cicatriciel, son autobiographie.
La tendresse familiale défaillante justifie un séjour hospitalier, le temps d’une opération de l’appendicite, en réalité une intervention destinée à le remettre dans une conformité masculine. L’acte est le premier d’une longue série d’internements.
Le récit de vie tient de la recension d’un calvaire. Rejeté par les siens, ostracisé par les autres, Sarita, son corps au milieu de nulle part, deviennent un champ d’expérience pour des praticiens, déterminés à régler une erreur de la nature qui ne rentre dans aucune classification.
Yann Dacosta s’empare de la confession de Sarita. Le metteur en scène nous transporte au cœur d’une serre horticole. Car Sarita se découvre une main verte et réparatrice.
Enveloppé des nappes musicales concoctées par Anne-Laure Labaste, Vincent Bellée est Sarita. La précision entomologique du texte trouve un écho dans le timbre posé, le ton mesuré de l’interprète. Sur scène Sarita se raconte dans une distance dandy, qui substitue au pathos, à l’imprécation, une rigoureuse distinction.
Admirablement dosé par son interprète, ce pointillisme ironique donne toute son acuité à l’éclairage documentaire sur un état et des pratiques consciencieusement invisibilisées.
Chienne de vie je hais et je t’adore !
Tout au long de Cicatriciel, Sarita applique le précepte avec méthode et dignité.
Le 11-Théâtre : 17 heures, jusqu’au 21 juillet. Relâche le lundi.
Réservations : https://www.11avignon.com/
Photographies : Gauthier Thypa.