Violaine Brébion a de la suite dans les idées. Après Jours sans faim, plongée dans les tourments de l’anorexie (représentée lors du Off 2022), celle-ci revient avec la chronique d’un service gynécologique.
La comédienne porte à la scène Le Chœur des femmes de Martin Winckler. Dans ce roman publié en 2009 (édition POL), l’auteur de La Maladie de Sachs (1998), décrit le quotidien du pôle Mère-Enfant du CHU Nord de Tourmens.
Œil nouveau oblige, la chronique s’amorce à l’arrivée de Jean (prononcer djiine, c’est une dame) Atwood. L’impétrante entame en marche arrière un énième stage, validation ultime de son parcours d’internat. Dès son entrée, elle s’affecte du mauvais entretien de certains équipements puis lie connaissance avec Franz Karma, le chef de service qu’elle surplombe, insensible au mandarinat.
Car plus que tout, Jean veut découper, réduire, réparer, greffer, recoudre, cautériser.. . Elle sera la Jeanne d’Arc du scalpel. L’impératif de la guérison élude le tempo des soins. Mais Jean est trop pressée pour s’attarder sur la conversation, l’écoute, la compréhension.
Comme l’on s’en doute, le stage devient un chemin d’apprentissage qui alterne considérations intérieures, scènes du quotidien (parfois drolatiques), échanges (techniques et souvent musclés) entre soignants avec les confessions de patientes ou la description d’actes médicaux.
Ces recensions chirurgicales (au sens vraiment propre du terme) convoquent les régions organiques, cernées par la terminologie. En ces instants, l’on prend conscience que derrière le sabir médical et autres éléments de langage, il y a de la matière, des textures, des fluides, des grosseurs, des cavités. De la chair, de la graisse et du sang qui parfois fomentent des révoltes jaillissantes.
Dans ce magma physiologique s’affairent des soignants, de qualités variables. Jean sera-t-elle une orfèvre bienveillante ou une mécanicienne à nœud papillon ?
Au plateau deux actrices (Clotilde Daniault, Violaine Brébion), un acteur (Xavier Clion) manipulent des plaques rectangulaires, tantôt bureau, comptoir de cantine ou table d’opération, sur lesquelles, sur le dos ou en chien de fusil se posent des corps féminins. Car quelques soient les actions, c’est toujours sur ou dans le corps des femmes que les sévices s’abattent, les examens s’effectuent, l’intervention se produit.
Ce portait de groupe est mis en un jeu par ses interprètes. Minutieuse, tonique, contrastée, cette éloge d’un service public de la santé, essoré mais efficace, empathique à tout jamais, est célébré par un collectif au talent complice.
A la toute fin, un coup de théâtre survient et le romanesque suranné des romans et séries hospitalières pointe le bout de son (joli) nez. La boucle se boucle en une ganse souriante. A suivre et à méditer.
Artéphile Théâtre : 14H, jusqu’au 21 juillet, Relâche le mardi.
Réservations : https://artephile.com/theatre-artephile-avignon-off-24/le-choeur-des-femmes-3/
Photographies : Anthony Magnier.