Le sens est dans le geste

Actualité du 14/01/2025

 

Sur le plateau s’étend un décor sylvestre, barré par une longue table. Cependant, nous ne sommes plus début juillet dans la Carrière de Boulbon mais en plein hiver, au sein de la FabricA. Le texte est toujours signé Tiago Rodrigues, toutefois il ne s’agit pas de Hécube, pas Hécube, créée l’été dernier au Festival d’Avignon mais de la reprise de Catarina et la beauté de tuer des fascistes, en diffusion depuis 2020.

Tout commence par un repas de famille, moment de liesse à l'issue duquel, comme chaque année, une personnalité fasciste sera exécutée puis enterrée sur un lopin de terre, surmonté d’une pousse de chêne-liège. Véganisme et circuits courts, la conversation s'avère badine à l’orée d’une journée bien ritualisée.

L’ouverture se déploie dans une humeur distanciée, façon Bertolt Brecht, alchimiste de l’effroyable au prisme de l’ironie. Puis s'immisce le grain de sable : Catarina rechigne à presser la gâchette sur un corps bâillonné.

 

Le sens est dans le geste.

La suite s’avère plus sartrienne. A l’instar des Mains sales, pièce écrite en 1948 par le romancier-philosophe (1905-1980), s’amorce un débat entre la mère et la fille sur l’usage de la violence. Au sein d’une contrée proche du village, lieu unique de Traces, film de Tiago Guedes (2022) sur un scénario de Tiago Rodrigues ; en ces parages dépourvus de théâtre, de cinéma et de bibliothèque, s’érige un questionnement autour de l’assouvissement grégaire d’une vengeance et la pratique réfléchie d’une justice impartiale.

Au même titre que Dans la mesure de l’impossible (2022) écrit et mis en scène par le même auteur, le décor relève de l'évolutif. Un pavillon de campagne se disloque au gré des tableaux d’ensemble ou de controverses plus intimes.

La proposition se clôt sur un discours au cours duquel se malaxent liberté, communautarisme, aversion de la différence, défiance des minorités. Sensation saisissante, la proclamation semble issue du creuset où infusent, au quotidien, bon nombre d'éléments de langage et d'incantations politiciennes qui irriguent les chaînes d’informations.

La démocratie possède-t-elle les armes pour lutter contre le fascisme ? La question sou-tend ce théâtre d’idées, qui souligne que l’humain est partout, même au plus profond des monstres.

Catarina ou la beauté de tuer des fascistes : samedi 18 janvier 19H30, dimanche 19 janvier 15H, FabricA Avignon.

Spectacle en portugais surtitré français.

Dans le cadre du Fest'Hiver des Scènes d'Avignon.

Réservations : https://festival-avignon.com/fr/evenements/catarina-et-la-beaute-de-tuer-des-fascistes-350908

Photographies : Josef Banderet.

 

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