A voir..., ou pas

Actualité du 14/08/2021

 

ROUGE, Farid Bentoumi, 1H28.

Nour décroche un poste d’infirmière dans une usine de bauxite en région Rhône-Alpes. Au fil des consultations et études de dossiers, elle constate une absence de suivi clinique et une prolifération de maladies professionnelles. Elle alerte le délégué syndical qui n’est autre que son père.

Avec Rouge, Farid Bentoumi poursuit son observation du monde du travail à travers le film de genre. 5 ans après Good Luck Algéria, la comédie cède la place au thriller. Le face à face fille-père laisse transparaître le dilemme des lanceurs d’alerte et la dialectique entre activités raisonnées et raisonnements productivistes. Des bonnes questions sont posées dans ce film bref, concis et bien interprété.

 

DÉSIGNÉ COUPABLE, Kevin Macdonald 2H09.

Que ce soit dans ses documentaires (Marley 2012, Whitney 2018) ou ses fictions (Le dernier roi d’Ecosse 2006, inspiré par le tyran ougandais Idi Amin Dada), Kevin Macdonald affectionne les grands sujets. Inspiré du récit de Mohamedou Ould Slahi, interné 14 années dans le camp américain de Guantanamo, Désigné coupable met en parallèle les traitements infligés aux prisonniers et les enquêtes menées, à charge et à décharge, autour des attentats de septembre 2001.

Jodie Foster, Benedict Cumberbatch, impeccables et concernés, Tahar Rahim dans une performance «oscarisable», animent et cautionnent cette mise en abyme de la violence d’état face à la barbarie terroriste. Édifiant, efficace, le contrat est rempli.

 

OLD, M. Night Shyamalan, 1H48.

Des pensionnaires d’un village de vacances ne peuvent quitter une plage isolée où le temps ne cesse de s’accélérer. M.N Shyamalan abandonne ses constructions conceptuelles (et assez gavantes) pour cette adaptation de Château de sable (2010), roman graphique scénarisé par le français Pierre-Oscar Levy. Solide et ingénieuse, la charpente résiste aux mignardises de la mise en scène et aux fins alternatives de l’épilogue. Old: un huis clos à ciel ouvert où l’on ne sent pas le temps passer.

 

TRUE MOTHERS, Naomi Kawase, 2H19.

Naomi Kawase délaisse ses méditations animistes pour un sujet plus tellurique. Adapté d’un roman de Misuki Tsujimura, True Mothersaborde la maternité à travers les itinéraires croisés d’une mère adoptive et d’une mère biologique(mention spéciale pour la prestation dense et sensible d’Aju Makita). La trame romanesque apporte structure et consistance au style éthéré de la réalisatrice. De ce film à la fois complexe et délicat, il apparaît que les mères adolescentes ne sont pas à la fête dans les familles japonaises. Mais est-ce une spécificité nippone ?

 

AMERICAN NIGHTMARE 5 (sans limites), Everardo Gout, 1H43.

American Nigthmare est une bande d’anticipation écrite et réalisé en 2013 par James DeMonaco. Dans un futur proche, les USA sont gouvernés par les Pères Fondateurs qui, afin de réguler la délinquance, décrètent la Purge. Ainsi chaque année pendant 12 heures, tout acte criminel est autorisé.

Si les épisodes 2 à 4 développaient une réflexion judicieuse sur les tenants et aboutissants d’une telle mesure, le nouveau chapitre se retrouve à la traîne de l’actualité depuis l’insurrection encouragée par Donald Trump en janvier dernier. Au delà de ce coup du sort, le film aligne, sans aucun recul, les brutalités tonitruantes jusqu’à un final fauché, moins proche de Mad Max que de ses ersatz transalpins (et encore 2019 après la chute de New York de Sergio Martino,1983, était bien plus modeste et inventif).

Qu’une bande aussi médiocre ait l’honneur d’une demi page dans un quotidien national, à priori de référence, relève de la pure cuistrerie ou d’une défense irraisonnée des marges cinématographiques. Mais peut-on qualifier de marginal un produit aussi massivement exposé ? Est-il utile de souligner qu’au cinéma et partout ailleurs, un genre devient intéressant lorsqu’il génère des œuvres ou des actes dignes d’intérêt ? Ce qui est loin d’être le cas dans ce cauchemar concocté par un scénariste paresseux et un tâcheron besogneux qui se repaissent de la sauvagerie qu’ils sont sensés questionner.

 

TOM MEDINA, Tony Gatlif, 1H40.

Ce nouveau portrait d’un jeune adulte charismatique et imprévisible se double d’un chant d’amour à la Camargue, ses paysages, son peuple (gardians, gitans…), sa faune (taureaux, flamands, moustiques) et sa culture ; dans de brèves séquences les personnages s’expriment en parlé d’Oc, la langue des troubadours.

Fidèle à lui même, Tony Gatlif compense un récit foutraque par sa rage de vivre et de filmer. On suit avec plaisir les frasques de Tom Médina au cœur d'un delta du Rhône terriblement cinégénique.

OSS117 ALERTE ROUGE EN AFRIQUE NOIRE, Nicolas Bedos, 1H57.

Nous l’avons quitté il y a 12 ans, aux prises à d’anciens nazis au sommet du Christ de Corcovado, (Rio ne répond plus), nous le retrouvons prisonnier de tortionnaires soviétiques quelque part en Afghanistan. Une fois de plus Hubert Bonisseur de la Bath alias OSS 117, réussit à s’en sortir et rejoint le QG parisien du SDECE.

Nous sommes en janvier 1981, au terme du premier septennat de président Giscard d’Estaing (dont la réélection est acquise). Après un séjour dans un tout nouveau placard informatique, l’as des services secrets s’envole en Afrique de l’Ouest afin de retrouver l’agent OSS 1001 (Pierre Niney).

Si derrière la caméra Michel Hazanavicius cède la place à Nicolas Bedos, cette troisième aventure s’inscrit dans la continuité des précédentes. Co-scénariste de la grande époque des Guignols de l’info (1990-1996), Jean François Halin est toujours à l’écriture. Après les tensions au proche orient dans Le Caire nid d’espions, puis l’attitude face aux anciens collaborateurs français durant l’occupation (Rio ne répond plus), Halin se penche sur la Françafrique et plus précisément sur les fraternelles relations qui unirent Valéry Giscard d’Estaing et Jean-Bedel Bokassa, président puis empereur de la République Centrafricaine.

La permanence qualitative se prolonge avec Jean Dujardin qui assume le principe selon lequel, contrairement aux agents secrets des romans et des écrans, le personnage prend de l’âge d’une aventure à l’autre. Ainsi, l’endurance et les performances sexuelles du héros sont l’occasion de quelques passages irrésistibles.

Second, troisième degrés, autodérision, refus des facilités, distribution choisie et moyens confortables, OSS 117, alerte rouge en Afrique noire prouve que la formule est toujours efficace. On peut noter qu’avec seulement trois films en 15 ans, les producteurs savent prendre leur temps, une façon d’entretenir l’attente du public et de peaufiner l’écriture et la facture de chaque épisode.

Rendez vous dans quelques années.

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