Attention bandits

Actualité du 16/10/2022

Louis Garrel est le fils du cinéaste Philippe Garrel et de la comédienne-réalisatrice Brigitte Sy. Pendant 20 ans, cette dernière anima des ateliers théâtre en milieu carcéral et finit part épouser un détenu, comme elle le retrace dans son film : Les Mains libres 2010. Cet épisode maternel constitue le point de départ de L’Innocent, dirigé et interprété par Louis Garrel.

Au grand dam d’Abel (Louis Garrel), Sylvie, sa mère (Anouk Grinberg) convole avec Michel (Roshdy Zem) rencontré dans une maison d’arrêt. A sa libération le marié offre à son épouse un local dans le vieux Lyon afin d’y installer une boutique de fleuriste. Michel s’imprègne d’art floral sous l’étroite surveillance d’Abel, épaulé par Clémence (Noémie Merlant), sa confidente-poisson pilote.

Avec L’Innocent Louis Garrel confirme le tournant amorcé dans son film précédent (La Croisade 2021), fantaisie écologiste, coécrite par Jean-Claude Carrière. Abordés dans le loufoque, les ressassements d’Abel montent en tension, lorsque le trentenaire neurasthénique découvre (secret de Polichinelle) que Michel n’est pas un repenti.

La comédie policière aligne des caractères à la fois emblématiques et subtilement dessinés. Derrière ses minauderies fantasques Sylvie dissimule une sagacité inquiète. Rattrapé par son passé, Michel manifeste pour sa vie bourgeonnante, un intérêt sincère et appliqué. Quant’à Clémence-Noémie Verlant épatante de drôlerie, sous ses saillies farfelues bouillonnent des sentiments indéfectibles.

Attentif aux personnages (et leurs interprètes), soucieux de vivacité narrative, Garrel enveloppe son mélange des genres dans un tissu de variations autour de la vérité et du mensonge; de l’aveu au jeu, du simulacre au cri du cœur. Le tricotage atteint son achèvement lors du hold-up, précipité virtuose de suspense, de burlesque et de climax sentimental.

Pour son quatrième opus, Louis Garrel s’extirpe de son cocon parisien, abandonne ses poses d’acteur auto-centré et se fond dans un bal des cabossés, cadencé par Herbert Léonard et les Ricchi e Poveri. Cerise sur la tableau : les lumières d’hiver tantôt mystérieuses, parfois protectrices, toujours entre chien loup. Sur ce terrain Garrel le fils, rejoint un père attaché à tout jamais aux émulsions argentiques et leurs nuances infinies.

Une vraie belle surprise.

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