Au hasard d’une soirée, Aymeric (Karim Leklou) retrouve Florence (Laetitia Dosch), une éphémère collègue de travail. Une liaison s’engage entre le trentenaire en roue libre et la célibataire enceinte de six mois.
Et lorsque Jim paraît, Aymeric sent poindre un instinct paternel qui se consolide au fil du temps. Une famille se recompose ainsi, dans l’équilibre et la connivence. Jusqu’au jour où réapparaît Christophe (Bertrand Belin) le père biologique de l’enfant.
Natifs de Lourdes, Arnaud et Jean-Marie Larrieu aiment filmer sur les hauteurs : au cœur des Pyrénées (Un homme, un vrai-2003, Tralala-2021), dans le Vercors (Peindre ou faire l’amour-2005), sur la Montagne Noire (Vingt et une nuits avec Pattie-2015). Au tropisme montagnard se greffe un appétit pour les formes contrastées.
Si la comédie reste sa prédilection, la fratrie s’est frottée à l’anticipation (Les Derniers jours du monde-2009), au polar (L’amour est un crime parfait-2013), au musical (le laborieux Tralala).
Adapté du roman éponyme de Pierric Bailly, publié chez P.O.L en 2021, Le Roman de Jim se situe quelque part dans le Haut-Jura. Pour l’occasion les Larrieu troquent leur hédonisme foncier contre une délicatesse attentive.
A ce sujet, faut-il reconnaître que, étalée sur vingt et un ans, cette saga d’ascendance (et d’ascension) regorge de belles et complexes personnes : de Florence à Olivia (Sara Giraudeau), en passant par Jim, le gamin (Eol Personne) puis le jeune adulte (Andranic Manet). Papa par conviction, Aymeric cimente l’obligeant aréopage.
Un être pas légitime à être.
S’il s’en prend physiquement plein la gueule dans Vincent doit mourir (Stephan Castang 2023), Karim Leklou, s’en reçoit plein la tête tout au long du Roman de Jim. L’acteur glisse son physique maladroit (sic) dans ce gaillard sympa et velléitaire qui, au même titre de Vivian Maier (1926-2009), passe son temps à photographier sans ne jamais rien développer. Donc Aymeric encaisse, s’incline ; mais il ne cède rien de son instinct, de ses aspirations et de sa prodigieuse humanité.
Du flic énervé dans BAC Nord (Cédric Gimenez 2020) au paternel imprévisible de Temps morts (Eve Duchemin 2023), en passant par le mage consolateur, figure centrale de Goutte d’or (Clément Cogitore 2022), Karim Leklou sillonne les registres sans accrocs, ni fausses notes.
En père putatif, altruiste mais déterminé, l’acteur devient la pierre angulaire du nouvel opus des frères Larrieu. En rupture de leurs rêveries libertines, les frangins hédonistes livrent un conte libertaire, où les hommes et les femmes partagent douceur, compassion et inconstance dans la plus exemplaire des parités.
J’aime bien, moi, la nuance.
Interview de Karim Leklou réalisée en juillet dernier à Avignon.
Une question-bonus à Karim Leklou, car dans la vie il n’y pas que le cinéma.
Le Roman de Jim : à partir du 14 août dans les cinémas.