Blues tonique

Actualité du 28/07/2023

Ça se passe à Madrid, pas la capitale de l’Espagne, mais une ancienne ville fantôme, au fin fond du Nouveau Mexique. Dans ce trou perdu, l’on imagine des habitants oubliés de tous et majoritairement acquis aux évangélistes-trumpistes.

Or ce n’est pas tout à fait le cas. Ainsi, au saloon de Madrid, s’organisent des soirée bingo afin de récolter des fonds pour assurer le financement du théâtre local, qui ne rapporte rien mais qui demeure indispensable pour l’équilibre de la communauté.

Dans ce lieu culturel sont représentés des shows travestis, préparés par quelques citoyens et suivis par un large public.

C’est dans cette bourgade atypique que s’est fixée Caiti. La jeune trentenaire sert des bières pour subsister et payer son prêt étudiant dont les échéances, suite aux intérêt variables, ne cessent s’allonger. Lorsqu’elle n’est pas derrière le comptoir, Caiti tient l’antenne à la radio locale, où elle révèle un sens de l’improvisation et un doux sourire dans la voix.

 

Justine Harbonnier croisa Caiti, une première fois, en 2013. Trois ans plus tard, l’élection de Donald Trump poussa la documentariste à reprendre contact avec cette new-yorkaise, réfugiée dans ce village où l’on coupe la télévision à chaque victoire républicaine.

Au moment des retrouvailles, Caiti a le blues. A travers son trajet et ses confidences, se dessine le portrait d’une génération marquée par le traumatisme du 11 septembre, puis la résurgence de la majorité morale. Seule avec son chien, Caiti griffonne son spleen dans des chansons. Car Caiti sait chanter et possède une sacrée voix.

Dès que je suis montée sur scène, à 4 ans, je ne pouvais plus m'en passer. J'ai eu suffisamment de chance de grandir dans la capitale mondiale de la comédie musicale avec une mère qui m'a toujours encouragée à poursuivre mes rêves.

Et Caiti préserve au fond d’elle même, l’optimisme inhérent à bon nombres de Musicals, Recension d’un rêve brisé, Caiti blues déroule un récit de survie, parsemé de doutes, d’espoir, de tentatives, d’échecs, d’opportunités.

Dans cette Amérique de rêve qui ne rassemble que 200 âmes, Caiti se sent bien et elle envoie. Lorsqu’elle reprend Sweet Tranvestite, tube emblématique du Rocky Horror Picture Show (1975), l’interprète affiche un aplomb, dégage un plaisir, à damner le plus radical des néo-conservateurs.

Décidément le Blues de Caiti mérite d'être partagé.

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