De la terre d’illusion au paradis perdu

Actualité du 13/06/2023

La Nuit du verre d’eau nous transporte au Liban, en 1958. Loin du tumulte de la révolution en marche à Beyrouth, une famille chrétienne savoure l’été dans sa résidence, au cœur d’une vallée escarpée.

Patriarche éclairé, Cheikh Daoud, (Ahmad Kaabour), règne sur la maisonnée où il couve ses trois filles : Nada-la rebelle (Rubis Ramadan), Eva-la romantique (Joy Hallak), Layla-l’aînée (Marilyne Naaman).

Mariée à Boutros (Talal Jurdi), cette dernière est la mère du petit Charles (Antoine Merheb Harb). L’arrivée d’un couple de touristes français : Hélène et René, son fils (Nathalie Baye, Pierre Rochefort), lézarde la chape d’ harmonie qui enrobe la villégiature.

L’acteur Carlos Chahine situe son premier long-métrage autour de sa terre natale, que sa famille abandonna pour la France, en 1975. Le portrait de cette famille soudée, éduquée, dont les valeurs s’effritent à l’épreuve des traditions, baigne dans le fatalisme crépusculaire cher à Anton Tchekhov, nimbées de lumières élégantes et sensuelles, dignes de Douglas Sirk, le prince du mélodrame (1897-1987).

A la fois délicat et sans fioriture (83 minutes, ni plus, ni moins), La Nuit du verre d’eau pose un regard romanesque et distille une méditation politique sur cette Terre d’illusion (titre choisi pour la diffusion dans les pays arabes), devenue, au gré de décennies de désastres et de démissions, un paradis saccagé. Et pour bien longtemps perdu.

Interview de Carlos Chahine, réalisée durant les dernières Rencontres du Sud d’Avignon.

La Nuit du verre d’eau : à partir du 14 juin sur les écrans.

Photographies: 13 Prods

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