Rio de Janeiro, de nos jours, Véra (Marieta Severo) a vécu une large partie de sa vie sous les dictatures aux affaires, au Brésil entre 1964 et 1985. Fidèle à ses engagements, la sexagénaire dirige désormais un orphelinat pour enfants séropositifs. Véra a deux enfants, le premier lui fut enlevé par ses geôliers dès sa naissance. Quant’à Tania (Laura Castro), mariée à Vanessa (Marta Nobrego), sa fille trentenaire rêve d’une famille médicalement assistée.
Les rapports s’avèrent tumultueux entre Véra la militante écorchée et Tania la décideuse embourgeoisée.
A nos enfants est, à la base, une pièce de théâtre écrite par Laura Castro et interprétée par Maria de Medeiros dans le rôle de Véra. A l’origine de l’adaptation au cinéma, l’actrice reste derrière la caméra. L’approche du politique par le prisme de l’intime n’est pas sans rappeler Capitaines d’avril, son premier long métrage de fiction (2000), qui restituait la révolution portugaise (dite des œillets) à travers la trajectoire de plusieurs personnages. L’on retrouve dans A nos enfants l’aversion du totalitarisme, l’inclination à la liberté exposées dans une légèreté profonde, un tact déterminé. A nos enfants-le film évite le piège du théâtre filmé par l’externalisation de plusieurs séquences, occasion d’une déambulation contemplative dans un Rio tout en verticalité, parsemée de jardins secrets ou d’architectures calfeutrées.
Dans le Rio de Maria, pas de Favelas, ni de plages surpeuplées, pas de foot, si ce n’est un ballon rond et une paire de crampons. Pas plus d’angélisme touristique, parfois des hommes armés s’invitent dans des espaces édéniques, par instant des rafales d’armes automatiques interrompent le chant des oiseaux.
Décalage entre instinct de sauvegarde et enjeux collectifs, beauté apaisée face aux affres sauvages, amour indéfectible tapi derrière des colères paroxystiques, le propos est dense, ambitieux. Mais tout résonne dans la petite musique de Maria de Medeiros, artiste délicate et éclairée, citoyenne du monde sensible et déterminée. A nos enfants est une ode à l’humain, au féminin. Et aux actrices bien entendu.
Interview de Maria de Medeiros.