Dialectique du mensonge

Actualité du 12/05/2025

 

Durant la seconde guerre mondiale, plus de 9000 espagnols, dissidents de la guerre civile qui dévasta le pays de 1936 à 1939, furent internés dans les camps de concentration nazis. En 1945, le rapatriement des survivants fut proscrit par le général Franco, réfractaire au retour d’opposants. La plupart des apatrides s’installèrent en France.

En 2000, Enrico Marco, lui-même ancien déporté, devient le président de l’Association des victimes espagnoles de l’Holocauste. Afin d’obtenir la reconnaissance de ses droits, l’homme témoigne, revendique, dans de multiples conférences et partout dans les médias

En 2005, alors que la cause progresse et que son mentor est au faîte de sa popularité, il se révèle que, en dépit ses affirmations, Marco ne connut jamais l’horreur concentrationnaire.

Ces précisions historiques définissent le contexte de Marco, l’énigme d’une vie.  Aitor Arrigi et Jon Garano se focalisent sur l’acharnement du falsificateur, envers et contre toutes les évidences qui l’accablent. Leur film brosse le portrait du mythomane compulsif, animal médiatique, qui bouscule les dénis, puis assume ses mystifications dans une même ténacité charismatique.

En 2020, avec Une vie secrète, le duo de réalisateurs (associé à Jose Mari Goenaga) se penchait sur les taupes, militants républicains qui vécurent, terrés dans des caves, jusqu’à la mort de Franco (1975). L’enfermement, la peur, le silence, étayent à nouveau l'épopée d'un affabulateur clinique qui, arc-bouté sur ses vérités (et ses névroses), s’enferre dans l'imposture.

Porté par Eduard Fernandez, saisissant précipité de force tranquille et de ruse confondante, Marco, l’énigme d’une vie dépasse le cas psychique pour l'analyse documentée d'une amnésie collective, indissociable d’un passé encombrant. L'examen se double d’une vertigineuse et captivante réflexion sur l’usage du mensonge : tromperie détestable ou salutaire mystification.

Plus de précisions et commentaires en compagnie de Jon Garano, invité des Rencontres cinématographiques du sud, en mars 2025.

Traduction : Jean-François Grima

Marco, l’énigme d’une vie : dans les cinémas à partir du 14 mai

Photographies : David Herranz / Epicentre Films.

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