Quelque part dans le Tchaharmal-et-Bakhtiari au sud-ouest de l’Iran, un herboriste à la mobilité limitée, partage une habitation précaire avec enfant tétraplégique. Une panne l’amène à contacter le fournisseur d’électricité. Sur place, le réparateur diagnostique une panne du transformateur qui surplombe la maison.
Le préposé se met alors en quête des pièces déficientes, dispersées dans divers ateliers. Porté par cet objectif, le bonhomme part tôt et rentre tard, escalade des collines, traverse des rivières.. . La mission réparatrice occupe ses vacations puis empiète, peu à peu, sur ses périodes de repos et sa carte bancaire.
Derb (sol dur) tel est le titre original de L’Odeur du vent, tourné sur sa terre natale par Hadi Mohaghegh. Le scénariste-réalisateur incarne lui-même cet électricien, qui hisse la conscience professionnelle au rang de quête philosophique. Par son aspect solaire et épuré, le film se rattache aux fables picaresques d’Abbas Kiarostami (1940-2016), dans l’œuvre duquel, les aspérités humaines se fondent dans les sinuosités des paysages.
Au sein d'une contrée âpre et splendide, évolue une humanité indifférente à toute forme de spéculations. Chacun agit selon un ordre des choses, fondée sur le bien commun, comme tacite évidence, A l’origine, le technicien exécute sa tâche mais, au fil de ses pérégrinations, il remplit un devoir. Contre toute justification, il prend le temps d’accompagner un aveugle qui croise sa route. Plus tard et sans plus de mots, un quidam juché sur un âne, mettra pied à terre pour examiner son véhicule défaillant.
Au cinéma comme dans la vie, il y a les paroles et les actes. On cause peu dans L’Odeur du vent. Mais la patience et l’obstination laconiques de ce petit monde, détourne la chronique vériste vers la parabole contemplative. Certes le film se peut s’appréhender comme un état des lieux de l’isolement et du dénudement dans lequel le régime iranien confine l’arrière-pays. Mais cette odyssée électrique développe un éloge de l’abnégation, qui dépasse la seule dictature islamiste pour atteindre l’Universel. Venu de nulle part, L’Odeur du vent intrigue, absorbe, émerveille, questionne et ce, bien après le terme de la projection.
Photographies: Bodega Films.