Le cadre d’un cabinet d’audit prépare un dégraissage dans l’entreprise où sont père est salarié (Ressources humaines 2000). Chaque matin un homme part au travail alors qu’il a perdu son poste depuis plusieurs semaines (L’emploi du temps 2001). Une romancière nourrit une inspiration en panne avec des éléments récupérés dans l’atelier d’écriture dont elle a la responsabilité (L’atelier 2017). Outre le soucis des antagonismes sociaux, le cinéma de Laurent Cantet est peuplé de personnages saisis de dilemmes schizophrènes.
Figure centrale d’Arthur Rambo, Karim (Rabah Naït Oufella) est un jeune journaliste, adoubé écrivain plein d’avenir par la presse et les lecteurs. Mais le soir de sa consécration, il fuite sur la toile que Karim serait à l’origine de messages racistes, antisémites, homophobes, sexistes.. , twittés par un certain Arthur Rambo.
De prime abord, le nouveau film de Laurent Cantet s’apparente à un conte moral au cours duquel un homme est rattrapé par les meutes qu’il a fréquentées. Mais la fable insinue d’autres questions sur la nature véritable du personnage. Karim atteint la notoriété grâce à un récit autobiographique, éloge d’une mère pétrie d'attention et d'abnégation. Pourtant, au fil des justifications, il semble qu’Arthur Rambo ait émergé en révolte contre la passivité et la servilité maternelle.
Tu apprends, lui glisse son mentor, par ailleurs écrivaine (Anne Alvaro). Mais Karim n’a-t-il pas tout compris ? Qui est Karim ? D’où vient Arthur Rambo ? Le film puise ses qualités dans l'ambivalence qui enveloppe ce jeune homme à la fois brillant et opaque, un parangon de la diversité, qui à défaut d'empathie, suscite une inquiète perplexité.