Sous la coquille le chaos

Actualité du 26/03/2022

Lamb venu d’Islande, Les Innocents de Norvège, Egö made in Finland ; une bise insolite souffle de Scandinavie. La progéniture, les enfants constituent le dénominateur commun des trois films, avec en toile de fond une famille entre recomposition et décomposition.

Grand Prix et Prix du Jury Jeune du dernier Festival de Gérardmer, Egö revisite l’inévitable passage de l’enfance à l’adolescence. A douze ans, Tinja (Siiri Solalinna) est l’aînée parfaite d’une famille idéale. Excellente élève, gymnaste émérite, la jeune fille, son père et son cadet contribuent au blog réalisé par une mère (Sophia Eikkilä), accro au design, au bien être et la diététique.

Dans la maisonnée diaphane et bien rangée rien ne dépare, si ce n’est un œuf (egg en anglais) que Tinja découvre un soir sous sa couette. Prémices de l’instinct maternel ? L’adolescente décide... de le couver.

Pour son premier long métrage Hanna Bergholm se glisse dans le monde de Barbie, qu'elle réemménage façon David Cronenberg. Outre la texture organique, les analogies ne manquent pas entre l’oisillon sous le lit et les créatures issues de la matrice, greffée dans le bas ventre de Samantha Eggar, héroïne malgré elle de Chromosome 3 (1979). L’un et les autres agissent et réagissent en fonction des empathies et des aversions maternelles. Une symbiose qui dans Egö introduit quelques hiatus dans le foyer aseptisé entretenu par Maman.

La réalisation dose manifestations magiques et dérives mentales. L’ambivalence débouche sur une mise en abîme de la monstruosité. Entre un ectoplasme chimérique, une mère branchée-disjonctée et un paternel éteint jusqu’à la transparence, où se terre la bête, ?

Conte de fée, satire sociale, au diapason de son titre, Egö brouille les pistes et trace sa route. Dans le sillage des Innocents et ses mutants sans référence, Tinja suit un apprentissage de corps et d’esprit, au sein d’un présent terrassant, face à futur qu’on lui a bien mal préparé. A l'intersection de Lovecraft pour la fantasmagorie et Michael Haneke pour l’observation clinique, Egö revendique un fantastique inventif, cinglant. Adulte tout simplement.

En dépit de ses qualités et de ses récompenses festivalières, Egö sortira « direct en vidéo ». (le 27 avril) La projection du 31 mars 20H30 au Cinéma Utopia Avignon constitue l’une des rares occasions de l’apprécier sur grand écran.

Donc à ne pas manquer !

 

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