Micmac sur la Riviéra

Actualité du 20/11/2022

 

Méandres de l’inspiration (Monsieur et Madame Adelman 2017), usure du temps (La Belle époque 2019), quelque soit le sujet, Nicolas Bedos raconte toujours des histoires de couple. Franchie la parenthèse OSS 117 (Alerte rouge en Afrique noire 2021), le réalisateur-scénariste, démultiplie avec Mascarade son tropisme favori.

De nos jours sur la Côte d’Azur, ex danseur brisé par une blessure, Adrien (Pierre Niney) devient le chevalier servant de Martha, grande actrice à l’étoile déclinante (Isabelle Adjani). Sa dolce vita languide monte en intensité lorsqu’il croise Margaux (Marine Vatch), belle et turbulente inconnue, experte es-arnaques et manipulations. Le couple ourdit un double stratagème dont Martha et un agent immobilier sans histoire (François Cluzet) seront les juteuses victimes.

Couple déchiré, amants maléfiques, romantisme sarcastique, la trame de Mascarade décline un bréviaire à la gloire de Billy Wilder (1906-2002), aussi à l’aise dans la comédie satirique (La Garçonnière 1960, Embrasse moi idiot 1964…), que le mélodrame (Boulevard du crépuscule 1950) ou le film noir (Assurance sur la mort 1944). A l’inverse de son modèle qui évoluait dans plusieurs genres sans toutefois les mélanger, Nicolas Bedos court plusieurs lièvres à la fois.

Mascarade démarre par un pilonnage de la foire aux vanité en lice dans les villas ou officines qui surplombent les côtes du Var et des Alpes Maritimes. Plus avant, le récit gagne en tension avec la mise en œuvre des escroqueries, elles même contrariées par les initiatives opaques de Margaux, en butte à des inclinations contradictoires.

Cinéphile éclairé, Nicolas Bedos assume ses influences et sa prédilection pour les intrigues à tiroir. Il affirme encore son attention aux interprètes (mention spéciale pour Marine Vatch, pierre angulaire de l'édifice et Emmanuelle Devos dans un rôle bref, ingrat, assuré dans une subtile intelligence). Sur la Côte d’Azur les pauvres envient des riches qui s’ennuient. La formule résume l’humeur de ce jeu de massacre orchestré par un conteur caustique, dialoguiste efficace, misanthrope fataliste.

Le dandy médiatique peut insupporter, Nicolas Bedos n’en demeure pas moins un réalisateur inventif, ambitieux, soucieux du plus grand nombre. Si tous les divertissements populaires arboraient l'invention et la qualité d’écriture de Mascarade, le cinéma hexagonal ne s’en porterait pas plus mal.

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