Mika ses potes et Miko

Actualité du 18/10/2025

 

Il était une fois dans la capitale de la crème glacée. En l’occurrence Saint-Dizier, sous préfecture de la Haute-Marne, creuset d’une entreprise à l’origine des Esquimaux, Kim-Cônes et autres chocolats glacés, friandises vedettes des entr’actes d’autrefois.

Au pied de la Tour Miko, vivotent Mika, Tony et Daniel. Le premier (Paul Kircher) ronge son frein à l’accueil d’un fast-food. Il squatte une maison avec le second (Idir Azougli une révélation), adepte des plans foireux. Plus âgé, Daniel (Salif Cissé) dirige une PME de construction.

Potes depuis toujours, le trio clope pas mal, écluse beaucoup et rêve de plages et de cocotiers.

Il y avait une envie de film catastrophe, une chute de météorite sur la ville, et au bout de deux ans, on a retiré la météorite et gardé tout le reste.

Co-scénariste et alter égo de Hubert Charuel, Claude Le Pape livre l’une des clés de Météors, projet pensé en lien direct avec Saint-Dizier, sa situation topographique et son tissu social.

Révélé et consacré (3 Césars) par Petit Paysan (2017), le binôme signe un second opus qui creuse les sillons tracés huit ans plus tôt. L’anatomie d’une famille d’éleveurs oblique vers l’observation de jeunes hommes qui fantasment des voyages mais sans budget ni bagage.

L’examen sociologique s’effectue au gré d’une intrigue attachée à la vivacité de la narration et au croisement des tempéraments. Ainsi, le récit s’ouvre sur une carapate nocturne et féline, du plus haut farfelu. Puis le ton se dramatise et présage le mélodrame.

Aux abois plus que jamais, Tony et Mika quémandent un emploi auprès de Dan qui coule le béton des fosses où s’enfouissent des déchets nucléaires. À l’instar de l'ultime segment de Petit Paysan, le dernier tiers verse dans le mystère et la hantise mentale. L’on songe alors à la dystopie souterraine dépeinte dans THX 1138, premier film de George Lucas (1971).

L’abrupte conversation sur les paysages comparés des Hauts-de-Seine et d’Occitanie, résume l’ethnologie du territoire qui sous-tend cette chronique de la jeunesse qui passe et du temps compté. L'histoire est charpentée et les observations frappées du sceau de l'expérience. Mais par dessus tout, Charuel et Lepape s’attachent aux caractères et affectionnent les acteurs.

Cimenté par un trio au diapason, plus une poignée de non-professionnels, dont quelques collaborateurs ou des membres de la proche famille du réalisateur, Météors décortique l'amitié indéfectible, sorte d’amour amical, sans testostérone, qui relie ces trois seuls au monde.

Au-delà du réalisme documentaire, au sein d’un écosystème où le champ des perspectives se mesure en rideaux baissés, Hubert Charuel et Claude Lepape cisèlent d’une comédie humaine qui embrouille la solitude et l’addiction. Pas de doute le duo sait regarder, aime raconter et déteste ennuyer.

Huit années séparent Petit Paysan et Météors. Cela valait le coup d’attendre.

Photographies : Pyramide distribution.

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