Chez Lina Soualem, le cinéma est, pour l’instant, une affaire de famille. Diffusé il y a deux ans, Leur Algérie, son premier opus, se focalise sur ses grands parents paternels. Dans les années 50 Aïcha et Mabrouk Soualem quittèrent l’Algérie pour Thiers dans le Puy-de-Dôme. Avec bon nombre de compatriotes, l’homme travaille à la manufacture de coutellerie en manque de main d’œuvre. L’épouse s’occupe du foyer et de leur fils (Lina est la fille du comédien Zinedine Soualem).
Leur Algérie montre et raconte, la France des colonies, des industries, du plein emploi. Mais si leurs descendants sont sur de belles voies, Aïcha et Mabrouk n’ont pas vraiment savouré les trente glorieuses. Derrière les silences de Mabrouk ou les rires nerveux de Aïcha s’insinue une sensation de déracinement, de résignation, mais aussi d’une digne fierté.
Ma mère m’a transmis un bout de sa langue.
Dans Bye bye Tibériade, Lina Soualem accompagne sa mère, l’actrice Hiam Abbas, lors de son retour dans sa Galilée natale. Issue d’un fratrie de 10 enfants, la jeune femme pratiqua la photographie, le cinéma puis quitta sa famille pour une troupe de théâtre.
Fille d’artistes, la réalisatrice possède, par ailleurs, une solide formation d’historienne, de journaliste et de documentariste. A l’instar de Leur Algérie, ce retour de la sœur prodigue agrémente la chronique des retrouvailles, d’archives intimes et extraits d’actualité. La saga familiale se coule dans le destin de la Palestine, terre paisible d’avant la Nakba, l’exil de 1948, suite à la création de l’état d’Israël.
N’ouvre pas les douleurs du passé.
Constellé d’effusions pudiques, de silences éloquents, Bye bye Tibériade fouille l’intimité d’une famille cultivée et humaniste, à l’épreuve de l’enclavement et de l’exode. Mais par delà les données historiques et sociologiques, Lina Soualem documente son amour pour une mère altière, rétive, mais qui lui a toujours appris le pardon.
Interview de Lina Soualem, réalisée lors de l’avant-première de Bye bye Tibériade, sur les écrans le 21 février.
