Parenthèse désenchantée

Actualité du 04/05/2023

Ils sont trois : Bonnard (Karim Leklou), Colin (Jarod Cousyns), Hamousin (Issaka Sawadogo), tous pensionnaires d’une maison d’arrêt. Et ce jour là, chacun bénéficie d’une permission de 48 heures.

Temps mort chronique ce court moment de liberté, ponctué de retrouvailles, accompagnées d'un cortège de silences, de maladresses embarrassées, parfois touchantes, tantôt explosives.

Ce triptyque constitue la première fiction d’Eve Duchemin. Cette parisienne de naissance apprend le cinéma à l’INSAS-Bruxelles. A sa sortie, elle se concentre sur le cinéma du réel. En 2015, suite au tournage de En bataille, portrait d’une directrice de prison, elle s’engage dans des ateliers auprès des prisonniers, durant lesquels s’esquisse les contours de Temps mort.

Il y a une histoire de vie cruelle à tous les mètres carrés, déclare la réalisatrice. Il en est de même hors les murs. Défini comme un ogre joyeux, Bonnard déjeune avec ses parents puis embarque son jeune fils dans une fête foraine. Colin pousse la porte au moment où sa mère s’en va au travail. Hamousin échange avec une épouse, perdue de vue depuis vingt ans.

 

Attentive aux visages et au langage des corps, Eve Duchemin serre au plus près les personnages, confrontés à des morceaux de vie perdus. Du samedi matin au dimanche après midi, le constat s'étend des permissionnaires à leur entourage, désemparé entre déception, rancœur et sentiments immuables.

Porté par une distribution qui combine professionnels (Karim Leklou, Johan Leysen éminent acteur de théâtre décédé en mars dernier) et néophytes (le rappeur Jarod Cousyns), Temps mort aborde la faute, la peine, l’exercice de la justice, l’espace d’une parenthèse désenchantée qui accorde toute sa place à l’appréhension du spectateur.

Conversation avec Eve Duchemin (photo) lors de sa venue en avril dernier pour l’avant première avignonnaise de Temps mort.

 

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