Place du 5 novembre

Actualité du 20/11/2023

Dans le sillage de ses deux derniers films marseillais (La Villa 2017, Gloria Mundi 2019), le nouvel opus de Robert Guédiguian s’ancre à nouveau dans la chronique familiale. Rosa partage son quotidien entre ses fils : Minas et Sarkis, ses activités d’infirmière à l’hôpital de la Timone et son activisme citoyen en faveur des défavorisés. Ses journées bien remplies se bouleversent lorsque elle croise Henri, le père d’Alice, la fiancée de Sarkis.

Ariane Ascaride (Mère courage toujours, Petite Sirène parfois) et la cité phocéenne demeurent plus que jamais au cœur de Et la fête continue. L’effondrement, le 5 novembre 2018, des immeubles de le rue d’Aubagne, la naissance du Printemps marseillais, suivie, deux ans plus tard, par la victoire de Michelle Rubirolla, candidate de la gauche unie, aux élections municipales, nourrissent le contexte de ce nouveau portait de groupe co-écrit par Serge Valletti.

Arménité chevillée au corps, militantisme bien compris, bonhommie hédoniste, passion des grandes plumes, consolation des belles lettres, le cinéaste et le dramaturge placent leur quatrième collaboration sous l'égide et le regard d'Homère qui trône à quelques mètres des immeubles effondrés. Autour du commandeur des conteurs, le duo  anime un petit théâtre nimbé d’attention pudique et de douce mélancolie.

Certes les temps ne sont propices ni à la préservation du bien commun ni aux pratiques collectives. Mais à l’instar de Ken Loach qui tire sa révérence dans The Old Oak ou Aki Kaurismaki qui marque son retour avec Les Feuilles mortes, Robert Guédiguian préfère l’espoir à l’amertume. Si Loach cultive un optimisme-raisonné, Robert le marseillais et Aki le finlandais optent, l’un pour une rêverie chaplinesque et l’autre pour une élégie impressionniste.

Dans une ville assouvie par les lueurs d’automne, l'irrémédiable majesté du thème de Camille, composé par Georges Delerue, pour Le Mépris (Jean-Luc Godard 1963) ou un refrain signé Charles Aznavour..., orchestrent ces moments de vie, que l’on savoure comme une balade au crépuscule, bien persuadé qu’après la nuit l’aurore va pointer.

Il me semble que la misère serait moins pénible au soleil, entonne la chorale dirigée par Alice (Lola Naymark épatante). C’est à voir. Mais tout au long de cette Fête qui continue, entre des pates aux noix et anchois, savourées en famille ou une gamelle avalée, dans un coin des urgences,  l’on ne cesse de croire en des lendemains qui chantent.

Serge Valletti revient sur les origines du film et sa collaboration avec Robert Guédiguian. Il évoque, par ailleurs, A la Paix, sa pièce d’après Aristophane, à l’affiche à Marseille du Théâtre de la Criée (jusqu’au 26 novembre) et enfin la parution de Mes débuts au théâtre, recueils de ses premiers textes édités Chez Walter.

 

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