Une donation maternelle de 10 000 euros, la participation de Zentropa, firme cofondée en 1992 par Lars Von Trier, Caméra d’or au Festival de Cannes 1984 pour le prometteur Element of Crime et l’aide inattendue de la commission du film danois, permettent de boucler le budget.
Co-écrit par Jens Dahl, pas un très bon écrivain mais qui savait comment présenter les choses et appliquer une structure qui tenait debout, Pusher reprend la trame du court homonyme. Coincé par la brigade des stups, Franck (Kim Bodnia), détruit le sac d’héroïne qu’il vient de négocier. Criblé de dettes, harcelé de toutes parts, le dealer se lance dans une course contre la montre, jalonnée de menaces et de coups tordu.
Tournée en hiver 1995 à la façon d’un reportage in situ dans les rue de Copenhague, la fuite en avant se double de l’étude d’un milieu, peuplé de figures fragiles (Vic-Laura Drasbaek), de complices instables (Tonny-Mads Mikkelssen dans sa première apparition au cinéma) ou de caractères dangereux mais en apparence ordinaires jusqu’à susciter une certaine empathie : Milo (Zlatko Buric) le parrain gourmet et patelin, Radovan (Slavko Labovic) son homme de main qui rêve d’ouvrir un Kebab.
Le thriller dévale sur un rythme sans faille et propose une représentation frontale mais responsable des scènes de violence. Ces caractéristiques seront à nouveau perceptibles dans les deux épisodes à venir.
Diffusé au Danemark en 1996, Pusher passe sous les radars du public et de la critique institutionnelle, focalisés par la lame de fond provoquée par Breaking the Waves de Lars Von Trier. La bande décroche néanmoins un distributeur en Suède, en Norvège et surtout en Angleterre où il rencontre un accueil aussi conséquent qu’inattendu.
Ce succès lui ouvre la porte des Etats-Unis. Mais Pusher ne sortira que dans quelques villes, sans matériel publicitaire.
De retour au Danemark, NWR fonde sa société de production et s’attelle à Bleeder (photo). Sorti en 1999, animé par le trio majeur de Pusher (Bodnia, Mikkelsen, Buric), le film détaille les réactions désemparées d’un homme introverti à l’annonce de sa prochaine paternité.
Une fois encore, Bleeder n’attire pas les foules, ce qui n’empêche pas son auteur de se lancer dans son Inside Job, son premier projet américain.
Acteur phare, suite à ses collaborations avec Spike Lee (Mo Better Blues 1990, Jungle Fever 1991) et les frères Coen (Miller’s Crossing 1990, Barton Fink 1991) John Tuturro incarne un inspecteur de police qui enquête sur le meurtre de son épouse… enceinte.
Inside Job a été un échec terrible et, à titre personnel, une banqueroute financière. La banque voulait son argent. Il fallait trouver un million de dollars et le film marchait nulle part, avec une distribution minimale et une critique très dure.
Donc, que faire ?
Malgré le revers financier, le directeur de Nordisk Film appartient au happy few qui apprécie Bleeder et Inside Job. Le producteur suggère au filmeur aux abois de tourner un nouveau Pusher. Une brève réflexion et celui-ci lui propose de fabriquer non pas un mais deux Pushers dans la foulée.