Depuis un demi-siècle, l’œuvre littéraire de Stephen King emplit à flux constant les salles de cinéma. De Carrie (Brian De Palma 1976) au prochain The Running Man (Edgar Wright), en passant par Shining (Stanley Kubrick 1980) ou The Dead Zone (David Cronenberg 1983).., l’écrivain du Maine est la source d’une imposante série de bandes d’angoisse et de terreur.
Toutefois, Les Evadés (1994), La Ligne verte (1999), tous deux réalisés par Franck Darabont, Stand by Me (Rob Reiner 1986).., révèlent une inspiration en rupture avec le Fantastique et l’épouvante. Adapté d’une nouvelle publiée en 2020, The Life of Chuck se situe à l’intersection de ces deux inspirations.
Par-delà ces précisions, il est difficile de résumer sans divulgâcher, le film qu’en tire Mike Flanagan. Le découpage en triptyque s’ouvre dans un embouteillage de fin de journée. Reclus dans son habitacle, Marty Anderson (Chiwetel Ejiofor) encaisse le chapelet de catastrophes qui s’égrène de l’autoradio. Rentré chez lui, il s’attarde dans une longue conversation téléphonique. A intervalles réguliers, un placard publicitaire salue un certain Chuck pour ces 39 merveilleuses années.
Chapitre deux : une petite ville par une journée ensoleillée. Comme il s’en remarque souvent aux USA, plus rarement de par chez nous, une jeune femme installe sa batterie sur le trottoir. Le solo s’ouvre sur un tempo cool, basique. Lunettes, mallette et complet noir, un quidam (Tom Hiddleston) ralentit son pas à proximité de la percussionniste. Il s’ensuit une séquence appelée à figurer dans les anthologies du film musical.
Épisode trois : dans un collège, un maigrichon, premier de la classe, s’attarde dans une activité extra-scolaire et artistique.
Le passé et le présent se fanent, je les ai remplis, je les ai vidés. Et m’apprête à remplir mon prochain repli de l’avenir. Suis-je en contradiction avec moi-même ? Alors c’est parfait, je me contredis (Je suis vaste, je contiens des multitudes).
Le Chant de moi-même, poème de Walt Withman (1819-1892), balise ce labyrinthe que l’on appréhende dans le malaise, avant de s’y perdre dans une curiosité émerveillée. Au détour de Life of Chuck l’on croise Mia Sara, alias Sloane dans la Folle journée de Ferris Bueller (John Hugues 1986) ou Mark Hamill-Luke Skywalker, 48 années après la toute première Guerre des étoiles. Souvenirs, souvenirs.., un filigrane nostalgique sourd de cette usine à gaz qui dilue sa structure conceptuelle au fil d’une déroutante élégie mentale.
Être faute d'avoir été ; The Life of Chuck est un film simplement compliqué, duquel s’échappe une mélancolie radieuse et à tout jamais universelle.
Pour ces 110 minutes, merci Stephen, merci Mike, merci Tom.
And Thank’s Chuck.
Photographies : Nour Films