Un chauffard percute un véhicule. Si son fiancé est tué sur le coup, à sa sortie d’hôpital, Pauline (Laure Calamy) devient animatrice de stages de récupération de points de permis. La nuit, la jeune femme éradique certains auditeurs-conducteurs, réfractaires à ses exposés et autres recommandations.
Vengeance sur fond d’incivilités routières, le prétexte nourrit Que la bête meure, réalisé en 1969 par Claude Chabrol, le long des côtes bretonnes. C’est dans ce même paysage au ciel bas et relief escarpé, que se déroule Bonne Conduite. Réalisateur indissociable du Palmashow (David Marsais-Grégoire Ludig), qu’il dirigea dans La Folle histoire de Max et Léon (2015) puis Les Vedettes (2021), Jonathan Barré retrouve le duo pour un nouveau projet qui panache la tragédie et le loufoque, le suspense et la comédie.
Le ton contrasté s’impose dès la séquence d’ouverture au cours de laquelle la distraction et la maladresse contrarient un projet mortifère. La suite est issue du même cru, copieusement vinaigrée de clins d’œil cinématographiques-télévisuels. Ainsi deux émules de l’ineffable Inspecteur Clouseau traquent l’Ange de la vengeance, lui (ou elle) même protégé(e) par l’insaisissable Keiser Söze. Le tout sous fond de crise de la pêche et de marasme ostréicole.
Certes il manque à la mise en scène la verve fantaisiste d’un Blake Edwards ou d’un Bruno Podalydès. Jonathan Barré se contente de filmer les prestations de ses interprètes. Judicieusement distribué, chacun devient pierre angulaire de l’entreprise. Marsais et Ludig cultivent la crétinerie foncière, hissée au rang de beaux arts dans l’extravagant Mandibules (Quentin Dupieux 2019). L’on retrouve avec délectation Tcheky Karyo, Bad Guy patenté du cinéma des années 80-90 (Nikita (1990), Bad Boys (1995)…).
Mais l’atout majeur demeure évidemment Laure Calamy, soliste tout terrain, à corps perdu dans chaque plan. Sa Pauline intrigue, inquiète par ses dérèglement douloureux et ses combines foutraques. Elle touche au cœur lorsqu’elle confie son chagrin puis atteint les sommets burlesques au moment de camoufler l’outil des ses crimes.
L’engagement et la plasticité émotionnelle de l’actrice cimentent un film qui diffuse une tonalité singulière, entre élucubrations potaches et affections d’une époque. Riche en embardées, hors des sentiers battus, Bonne Conduite mérite le détour.