Viva Germi

Actualité du 24/10/2023

Séduite et abandonnée se situe en Sicile, où, imprégnées d’harmonies cruciales, les paysages annoncent la cascade à venir des westerns-spaghetti.

Le film est incisif et minutieux comme un scénario d’Age et Scarpelli, enlevé et ravageur comme un film de Pietro Germi (1914-1974).

Si, à la fin de la seconde guerre mondiale, il se laisse glisser dans le néoréalisme, le bonhomme s’aventure rapidement vers le polar (Au nom de la loi 1949) ou la fresque minière (Les Chemins de l’espérance 1950)

Après Meurtre à l’italienne (1959), sommet du genre policier, l’acteur-réalisateur bifurque vers la comédie et livre coup sur coup deux réussites majeures : Divorce à l’italienne (1961) et, trois ans plus tard, Séduite et abandonnée.

Plus rugueux, moins raffiné qu’un Dino Risi ou Ettore Scola, Germi cultive une énergie tellurique, qui n’élude en rien la tenue du récit et la précision de la mise en scène.

A travers le calvaire de la tendre Agnese, interprétée par la toute jeune et déjà divine Stéfania Sandrelli, Germi et ses scénaristes cognent, à bras pas vraiment raccourcis, sur les vanités de sous-préfectures, les préceptes de bénitiers, les rumeurs au suivisme obscène. Et, par dessus tout, ils bastonnent l’arrogance de hobereaux, confits dans un machisme moyenâgeux.

C’est énorme, iconoclaste comme un dessin de Dubout. C’est dévastateur comme une pièce de Jarry. De toute évidence Pietro Germi n’était pas un gentil mais ses indignations s’exprimaient dans une salutaire férocité. Voilà bien un cinéaste méconnu et plus que jamais essentiel.

Rétrospective Pietro Germi : Séduite et abandonnée, Au nom de la loi, Les Chemins de l’espérance : jusqu’au 6 novembre, Cinéma Utopia Avignon.

A guetter scrupuleusement dans les autres villes.

 

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