Blanche les couleurs du temps

Actualité du 18/06/2025

 

Si le couturier Jacques Doucet (1853-1929) leur ouvrit les portes de sa collection et sa bibliothèque, Jacques-Émile Blanche (1861-1942) invoqua sur ses toiles et ses écrits, bon nombre d’artistes et écrivains de la fin du XIXème et de la première moitié du XXème siècle.

A ce titre, quoi de plus logique que le Musée Angladon-Collection Jacques Doucet, consacre son exposition 2025 à ce peintre, par ailleurs homme de lettres, critique d’art et musicien ?

Jacques-Émile Blanche. Peindre le temps perdu. Sous cette appellation, Lauren Laz, directrice de la maison et commissaire de l’exposition, réunit une soixantaine d’œuvres, auxquelles se greffent des extraits de sa production littéraire. En conséquence, cette année, outre le second étage dédié aux exposition ponctuelles, l’accrochage sillonne la totalité du bâtiment ; à commencer par la verrière d’accueil, tapissée d’un grand format représentant l’écrivain André Gide en compagnie de quelques amis au Café maure de l’Exposition universelle de Paris, en1900.

 

Au premier palier, les salles d’ambiance et la galerie des chefs-d’œuvre se marquettent de cartels, dans lesquels Blanche-le mémorialiste livre son sentiment à l'égard des périodes historiques ou ses opinions sur certains de ses alter ego.

Déployée au second niveau, Jacques-Émile Blanche. Peindre le temps perdu, s’inscrit en référence à la cathédrale littéraire édifiée par Marcel Proust (1871-1922) entre 1906 et 1922. Une humeur méditative enveloppe le parcours chronologique qui s’ouvre sur les portraits recueillis du père et de la mère de l’artiste.

 

Du côté de chez soi compile paysages et natures mortes. Inspiré par le roman de Colette (1873-1954) Le Blé en herbe s’attache aux visages d’enfants.

Courir les rues relève du carnet de voyage, de Paris à Venise, en passant par Londres et Avignon, la Cité des papes représentée par deux peintures sur bois, à ce jour non restaurées).

Inspiré du titre d’un roman d’Edith Wharton (1862-1937) avec laquelle Jacques-Henri Blanche entretint une durable amitié, Chez les heureux du monde rassemble les portraits d’artistes proches : Stéphane Mallarmé, Jean Cocteau, Anna de Noailles.. . Et bien attendu la légendaire effigie de Marcel Proust, réalisée en 1892 et prêtée, jusqu’en octobre, par le Musée d’Orsay.

 

Aux morts des armées couvre la première guerre mondiale au cours de laquelle Blanche, trop âgé pour être mobilisé, multiplia les scènes endeuillées.

Aux morts des armées de la République, l’expression est extraite d’un poème de Paul Claudel (1868-1955). L’écrivain-diplomate fut, lui aussi portraituré par le chroniqueur-illustrateur qui l’appréciait peu. A la vue de la toile, l’animosité parait réciproque.

Celle-ci trône dans Le temps retrouvé, ultime étape du parcours où les traits de Paul Valéry, André Maurois, Henry de Montherlant, la Comtesse de Castiglione.., émergent d’un regard auréolée par le temps qui passe et la ressouvenance.

 

Si elle incite à l’apaisement et favorise l’attention, la subtilité de la mise en lumière souligne la palette foisonnante et la curiosité foncière de Jacques-Émile Blanche. Le touche-à-tout compulsif s’avéra le témoin attentif d’une époque où tout s’accélère, tout en se montrant l’assesseur sensible des émois propres aux heures révolues.

Les intentions et commentaires de Lauren Laz, autour de son approche de l'accrochage.

En dialogue avec Jacques-Émile Blanche. Peindre le temps perdu, Attendre la nuit, installation élaborée par Suzanne Hetzeld occupe l’espace-capsule du Musée.

D’autre part, en amont de la frénésie festivalière, une fin d’après midi chorale lors du 21 juin, Fête de Musique et une lecture de Proust à Colette par l’actrice Marie-Christine Barrault, le 25 juin, accompagnent l’exposition consacrée à cet enlumineur-passeur, archétype de l'honnête homme dans l'acception du Siècle des Lumières.

Lauren Laz livre plus de précisions sur ces rendez-vous.

Jacques-Émile Blanche. Peindre le temps perdu  : jusqu’au 12 octobre Musée Angladon Avignon.

Ouvert du mardi au dimanche (13H-19H).

tel : 04 90 82 29 03.

https://angladon.com/agenda/

Photographies : Michel Flandrin, © Agence La Belle Vie/Réunion des Musées Métropolitains Rouen Normandie.

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