L’Éloquence des bêtes

Ce que disent les plantes (janvier 2024), Le Futur est déjà là (octobre 2024), les deux accrochages accordèrent un large temps de parole au végétal, son discours au présent et ses ramifications à venir. Il était temps de se mettre à l’écoute du monde animal.

Les animaux, ça vous parle ?, constitue le troisième et dernier volet de Symptômes du vivant. Par ce triptyque, Véronique Baton et l’équipe du Grenier à sel-Avignon examinent l’écosystème, sa dégradation, son évolution, au prisme des regards d’artistes d’hier et d’aujourd’hui.

À cet effet, dix intervenants (plasticiens, vidéastes, dessinateurs, développeurs sonores...) se partagent l’espace de l’ancien hôtel des ventes d’Avignon.

Comme il se doit dans les accrochages imaginés pour ce lieu voué aux connections entre les arts et les nouvelles technologies, la sélection salue quelques grands précurseurs.

L’amorce de la visite s’effectue sous le regard attentif, un tantinet narquois de la Pieuvre, filmée en 1927 par Jean Painlevé (1902-1989), pionnier du documentaire animalier.

Au sous-sol est reconstitué le salon-cabinet de travail de Knud Viktor (1924-2013), ermite du Luberon, qui passa une large partie de son existence à écouter et enregistrer les rêves des lapins et les repas des vers de terre.

Les deux salles du rez-de-chaussée invitent à traverser la Fabrique des fables avant de flâner Au delà des mots.

Conçue par le Collectif LAB212, Arae immerge les visiteurs au cœur d’une frondaison lumineuse. Sous la surveillance fantomatique de la Tunique du piégeur, assemblée par Daniel Spoerri ( 1930-2024), l’installation pensée par Béatrice Lartigue et Nicolas Guichard,  enveloppe le flâneur dans les bruits de la forêt, retravaillés par les compositions du Chapelier Fou.

Plus de détails en compagnie de Béatrice Lartigue et Nicolas Guichard.

La seconde galerie et le balcon prolongent des Dialogues partagés.

Ainsi Vaillant, pigeon voyageur, héros de la 1ère guerre mondiale est à l’origine de Prince Vaillant sculpture-automate réalisée par Nicolas Darrot. Par ailleurs, ce dernier suspend Apollo, fauve en apesanteur dans le hall du Grenier.

Dans l’un des deux sas, les évolutions déliées d’un lapin danseur côtoient la végétation du Jardin del amor,  tenture crayonnée digne des illustres tapisseries du moyen-âge.

Une installation plus une animation dessinées et réalisées par DomInique Castell.

La Fabrique des fables trouve une illustration littérale dans les Fabulations de La Fontaine où, dans une calligraphie impeccable, une plume rédige des fabliaux inédits, issues des algorithmes d'une Intelligence Artificielle, préparée par Filipe Vilas-Boas.

Trophées de chasse colériques, Dolly (robots jouets) ratées, clonages aventureux d’animaux de laboratoire ; l’humeur caustique de Florence Cadet jouxte le minutieux recyclage à l’origine du fabuleux Phasme Carapace.

Création animée et sonore, l’arthropode géant appartient à Animae Ex Musica, bestiaire utopique réalisé par le Collectif / Tout / Reste / À / Faire.

Mathieu Desailly précise l’esprit de ce groupe d’artistes voué à dépasser l’usure et prolonger la durée de vie des instruments de musique fatigués.