Ouverture (lunaire) en pleine séance de pose. Première curiosité : le modèle est un homme et le peintre, une femme. Seconde particularité : Carpeta et Galactia sont amants et artistes.
La Renaissance à Venise, le doge commande à Galactia une toile longue de trente mètres, afin de célébrer la bataille de Lepante qui consacre la victoire de la flotte catholique sur les escouades musulmanes.
Si sa désignation provoque certains remous, ses options artistiques, moins sensibles au triomphe qu’au carnage, compliquent la tâche de l’artiste insolente. Intrigues, coups bas, aigreurs, intimidations.., l'achèvement de l’œuvre ne suivra pas un fleuve vraiment tranquille.
La place d’une femme dans les relations complexes (et passionnantes) entre l’art et le pouvoir, Howard Barker combine cette double thématique dans Tableau d’une exécution.
Fervent de Shakespeare, le dramaturge britannique décortique, dans une rigueur ironique, la vanité des commanditaires et l’arrivisme des courtisans. Dans cet écheveau de calculs et de complots, le goût se mêle aux entourloupes. La dualité est personnifiée par Urgentino. Machiavélique, cassant, le doge perçoit néanmoins les fulgurances du talent parmi la routine académique. A charge d'assimiler la beauté dans des manœuvres disgracieuses
Rompue à la comédie (Marivaux, Jarry, Beaumarchais..), sans oblitérer sa griffe, pétrie de vivacité et de précision, Agnès Regolo sort de sa zone de confort et fraye avec le drame élisabéthain. Châssis, tables, établis, échafaudages.., échafaud, les machinations les plus obliques, se trament entre les angles droits. Six interprètes, des fidèles et nouvelles venues, animent cette fresque gothique, précipité de passions dévorantes, de pensées cauteleuses et d'intégrité malmenée.
Sur son chevalet, ce Tableau d’une exécution s’avère dense, brillant et fort bien mené.
Tableau d’une exécution : Théâtre des Halles,18h45, jusqu’au 26 juillet (relâche le jeudi).