Côté jardin : l’atelier d’un peintre à Paris ; côté cour : une chambre d’hôtel à New York. Ici, Evelyn s’enquiert d’un frère qu’elle ne connaissait pas. Là, Alain étale ses toiles avec placidité. Sur ces deux espaces s’agence un puzzle narratif qui traverse le siècle dernier.
Elia généalogie d’un faussaire conjugue les espaces et les temporalités dans une dextérité digne des meilleurs feuilletonistes. Les secrets de familles surgissent des abîmes de l’Histoire. Comment un orphelin pilleur de tronc devient-il un falsificateur de haut-vol ? Les épreuves, les non-dits, les absences tracent les destins, façonnent les personnalités.
Écrit et interprété dans le rôle d’Elia, par Jean-Loup Horwitz, le texte agrémente le romanesque d’une approche rigoureuse de l’Histoire de l’art et des dommages collatéraux (parfois machiavéliques, voire pittoresques), liés aux barbaries et spoliations commises par les nazis.
Fils du peintre-réalisateur Charles Matton (1931-2008), auteur de L’italien et les roses (1972), film lui aussi construit en flash-backs, Léonard Matton préserve la lisibilité de la polyphonie. Son approche bénéficie des lumières de Dan Azzopardi et la prestation des interprètes, dont Gabrielle Lazure (La Belle Captive filmée en 1983 par le malicieux Alain Robbe-Grillet) et Magali Bros, aérienne émule du transformiste Leopoldo Fregoli.
Dire l’indicible est une affaire impossible.
Les chagrins sont tenaces et les dénis vivaces. Mais la révélation finit un jour par trouver sa voie. Tel est l’aboutissement de ces chemins de vie, tracés avec esprit et solidement documentés. Sans contrefaçon, cette généalogie d’un faussaire suscite une réelle émotion et se suit avec un vrai intérêt.
Elia généalogie d’un faussaire : 15H35 du 5 au 26 juillet, relâche le mardi. Théâtre du Petit chien.
Réservations : https://www.chienquifume.com/
Photographies : Artistic Scenic