On ne lâche rien

Le soleil est à peine couché mais la salle est sur éclairée. Aux côtés de tapis de sports, tremplins, agrès, quelques instruments de musique jonchent le plateau. Vers le fond, posée sur ses trois jambes une chauffeuse de salle, son mégaphone, surplombent un gradin. Entre une poignée de supporters, puis un Pom-Pom boy. Pas de doute il va y avoir du sport.

Les cinq performeurs arrivent sous les ovations. Il ne s’agit pas d’une équipe mais d’un groupe musical dont le répertoire se limite à un seul titre. La chanson est interprétée crescendo, ad libitum par un chanteur sur tapis roulant, accompagné d’un batteur écartelé entre fûts et cymbales, un claviériste vertical, un contrebassiste horizontal et une violoniste perchée sur une jambe, en haut d’une barre fixe. En plus il pleut et chacun doit écoper.

Une œuvre circulaire comme la vie, un analgésique pour le monde. Miet Warlop décrit ainsi One Song. A la suite de Milo Rau (La Reprise Avignon 2018), Faustin Linekula et Angelica Liddell (Liebestod Avignon 2021), la performeuse-metteure en scène signe le 4ème chapitre des Histoires de théâtre, projet initié par le même Milo Rau, directeur du Théâtre de Gand (Belgique) où Miet Warlop est régulièrement invitée.

L’artiste empile un ressassement tonitruant qui siphonne jusqu’à l’ultime goutte d’énergie. Cela tient de l’exploit, du débordement où l’on va jusqu’au bout du bout, où l’on ne lâche rien. Entre la transe et la communion cette tornade théâtrale diffuse ce shoot d’énergie vitale qui permet de surmonter un obstacle, d’assouvir une peine, de poursuivre la résilience.

En cette première moitié de Festival, au sortir d’une pandémie, au moment où la guerre menace, où des pestes brunes titillent le pouvoir, One Song s’inscrit dans le sillage de Ma jeunesse exaltée, Sans tambour et Le Nid de cendres. Ce concentré de vitalité atteint une catharsis joyeuse, une ode à la fantaisie, un manifeste de vie,  jusqu’à ses dernières forces, envers et contre tout.

Miet Warlop et son équipe nous abandonnent au bout d’une heure, abasourdi, dans une irrépressible euphorie.

One Song du 8 au 14 juillet Cour du lycée Saint Joseph.

Photographies: Christophe Raynaud de Lage.

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