Les Abimés
Les Abimés est une fresque (1H30) segmentée en triptyque. Dans Le bruit et le silence, Ludo protège et console son cadet des violences paternelles. Arlequin et la première graine place P’tit Lu aux bons soins de Nora, éducatrice dans un foyer d’accueil. A l’orée de Fugues, Ludo retrouve Faïza son amie de toujours et rencontre Anna, madrée à toutes les résistances.
Une robe malmenée figure l’innommable, tapi dans les Bruits et le Silence. Lorsqu’on s’en va dans sa tête, l’on déniche un œuf. Une paire ciseaux, les touches de piano consolent et révèlent.
Julien Despont, Marion Träger, Nathan Chouchana répercutent la subtile énergie de la partition de Catherine Verlaguet.
Peu à peu, Les Abîmés se réparent. Non seulement Ludo et P’tit Lu grandissent mais grâce à Faïza, Nora et Anna, ils s'épanouissent.
A la fin, la musique c’est plus du Bruit. Le Silence s’est terminé. L'on peut rentrer à la maison.
Le Totem : 11h05, jusqu’au 20 juillet. Relâche le 14.
Réservations : https://www.le-totem.com/evenement/les-abimes/
L'article intégral c'est par ici: https://www.michel-flandrin.fr/festival-d-avignon-2024/festival-d-avignon-2024-off/une-histoire-de-lu.htm
Lettres à Anne
Entre un fauteuil et une méridienne, Céline Roux et Samuel Churin donnent corps à plus de trente années (1962-1995) d’une correspondance adressée par François Mitterrand à Anne Pingeot.
L’adaptation de Alice Faure transforme ces missives à sens unique en écriture à deux voix. Lui gravit les marches du pouvoir. Elle, les échelons de conservateur d’état. François cloisonnait et Anne se glissait dans les cases. Saint-Cloud, Chantilly, Ville-d’Avray.. , la litanie des communes égrène d’intenses cinq à sept.
Lettres à Anne dresse la chronique d’une passion où la plénitude des escapades alterne avec les tourments de l’éloignement. La correspondance se teinte d’arrière plans politiques (l’apparition de policiers auprès de Anne dès l’élection de François à l’Elysée) et de l’anatomie d’une singulière organisation amoureuse (l’absence de Danielle, la légitime, dans les derniers moments).
Mais ce rendu épistolaire demeure avant tout un éloge du style et la langue, comme complément ou supplétif au vertige des sens.
J’ai enseveli ta rose dans Proust. Pas de doute, il savait écrire le Président.
Théâtre Transversal : 11H, jusqu’au 21 juillet.
Ils ne méritent pas tes larmes
Ils ne méritent pas tes larmes adapte Little Rock 1957. Publié en 2018, l’histoire des neuf lycéens noirs qui ont bouleversé l’Amérique retrace la rentrée des classes de neuf adolescents afro-américains à la Little Rock Central High School.
Thomas Snégaroff donne corps à son livre-enquête. Avec une réelle aisance, le journaliste endosse une dizaine de personnages adultes et adolescents, tous parties prenantes dans cette recension d’un racisme endémique. Des documents visuels et sonores complètent la restitution.
Compagnonnes discrètes, les clarinettes de Xavier Bussy ponctuent ce spectacle-dossier qui, à l’aune de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique, dépasse la simple dimension historique.
Ils ne méritent pas tes larmes dose les faits et l’émotion, tout au long de ce récit mémoriel, révélateur de l’aplomb admirable et des pulsions misérables qui façonnent l'humanité.
Le Petit Louvre-salle Van Gogh : 11h35, jusqu’au 21 juillet. Relâche le lundi.
Réservations : https://theatre-petit-louvre.fr/avignon/ils-ne-meritent-pas-tes-larmes-de-thomas-snegaroff-little-rock-1957/
Photographie : Carlier
Hope Hunt and the ascension into Lazarus
A la mi-journée, une fraction de la rue Guillaume Puy devient une artère de Sheffield ou Newcastle, cités ouvrières du Nord de l’Angleterre. Un corps en jogging s’extirpe du coffre d’une épave tonitruante. La boule d’énergie harangue l’assistance et laboure le pavé. Puis elle se propulse vers le plateau (nous sommes devant le théâtre des Hivernales).
Au bitume mal jointé se substitue la réconfortante souplesse du tapis de danse. La fureur se dilue dans des figures plus apaisées voire majestueuses.
La danseuse-chorégraphe nord-irlandaise Oona Doherty, transmet son solo Hope Hunt and the ascension into Lazarus à Sati Veyrunes.
L’interprète se jette dans cette figure androgyne, qui, au long de cette battle avec elle-même, transcende colère et force vitale sur les cimes de la Beauté.
La tornade est brève et incandescente.
Théâtre des Hivernales-CDCN d’Avignon : 12h, jusqu’au 16 juillet.
https://www.hivernales-avignon.com/spectacle/hope-hunt-and-the-ascension-into-lazarus
Matt et moi
Quand j’avais quatorze ans j’étais fan de Matt Mattox.
Carole Bordes ouvre ainsi son solo frappé du sceau de l’autobiographie. La danseuse revient sur sa fréquentation du danseur-chorégraphe américain (1921-2013), pionnier de la Danse-Jazz.
Au delà de l’hommage, se dessine un chemin de vie. En dialogue avec les pulsations de Samuel Ber à la batterie et les silhouettes retravaillées par le concepteur visuel Johan Fournier, Carole se raconte. Elle verse son tribut à un maître-pédagogue, elle exalte sa passion pour une danse pas forcément dans les tendancse.
Matt et moi-matez moi. Il y a encore la constitution plus ou moins conforme et la carcasse qui répond, soutient, renâcle parfois.
Le solo progresse entre démonstration et confession. Doutes, coups de mou et redressements, Carole Bordes se livre dans une grâce tonique et une délicate lucidité.
Matt et moi dessine la topographie d’une passion avec ses pleins, ses déliés mais chevillée au corps à tout jamais.
La Scierie : 12h20, les jours pairs, jusqu’au 20 juillet.
www.lascierie.coop 04 84 51 09 11
Photographies : Caroles Bordes.
Les Meutes
Dans une douceur méthodique, une voix féminine raconte une entrée dans la vie.
Le temps avance et le timbre prends corps. Emergence des premières griffes, éclosion des sensations. Expériences, émotions.
Des aventures à l’attachement, plénitude et communion, c’est une belle histoire. Jusqu’à ce que s’amorcent les mécanismes de la tradition, qui ploient les idylles sous le joug des engagements.
Aux côtés de Gautier Boxebeld, Eloïse Mercier donne corps à cette chronique d’un malentendu.
L’art de l’accessoire : un sofa, une lampe, quelques ballons.., les constructions visuelles et sonores ouvragées par Vincent Béranger orientent les chapitres, de l'état des lieux vers les méandres du conte.
Au fil des Meutes, Eloïse Mercier, instille le mythe et la légende dans les anfractuosités du quotidien.
Il s'exhale un vérisme envoutant ciselé par une orfèvre du frémissement
La Manufacture Saint-Chamand : 12H20, jusqu’au 21 juillet, Relâche le mardi.
Réservations : https://lamanufacture.org/programmation/les-meutes/
Intégralité de l'article sur : https://www.michel-flandrin.fr/festival-d-avignon-2024/festival-d-avignon-2024-off/la-louve-et-les-chasseurs.htm
Photographies : Vincent Béranger.
Moi Vivante
Depuis son plus jeune âge Ferdinande Mouthe, archive les avis de décès. Sa mère a tout essayé : de l’exorciste de sous préfecture à la psychologue auto-centrée.
Marie-Hélène Goudet écrit et anime ce petit monde qui renvoie à Pagnol pour le sens du détail et Audiard pour les expressions imagées. Confronté aux attitudes compulsives de Ferdinande, la niaise, l'attardée, personne ne se dit : Et pourquoi pas ? Mieux avisé, spectateur lui se pose la question.
Moi vivante s'adonne à l'apologie d'une excentricité ordinaire.
On prend!
Théâtre des Barriques : 12H50, jusqu'au 21 juillet. Relâche le mardi.
Réservations : https://www.theatredesbarriques.com/
Léviathan
Fille d’Hécube et Priam, souverains de Troie, Cassandre accorda ses faveurs à Appolon. En retour, celui-ci lui transmit le don de lire l’avenir. Le problème est que personne ne l’écouta.
Après Eurydice aux enfers, présenté à Avignon en 2022, Gwendoline Destremeau persiste dans la mythologie. En rupture avec l’héroïsme guerrier ; des conflits homériques aux abominations d’aujourd’hui, sa Cassandre devient pythie de la désolation,
En voix et en corps, Clara Koskas s’empare de la diatribe vive, incisive, ulcérée. A ses côtés, Ariane Issartel sample voix et violoncelle. Les lumières ouvragées de Titiane Barthel enveloppent ce voyage au bout de la folie des hommes, sur les champs de bataille ou dans les sacristies.
Le problème c’est que la guerre dure longtemps.
Léviathan est un oratorio théâtral sombre et incandescent, un geste viscéral et parfaitement maîtrisé.
Artéphile Théâtre : 14H50, jours impairs, jusqu’au 21 juillet.
Réservations : https://artephile.com/mevents/leviathan-artephile-off-24/
Venise, récit chanté d’un corps
Venise désigne en premier lieu une chanson, dans laquelle Fanny Chériaux évoque la Cité des doges, désertée, rassérénée par les confinements. Venise est désormais inclus dans le titre d’une autobiographie musicale emmenée par Miss Chériaux.
Flanquée des impayables Thomas Couppey et Sébastien Dalloni, boys parfois dépassés par ses emportements, la diva entreprend le récit chanté d’un corps pas toujours conforme aux injonctions d’un clan ou du moment.
De l’anecdote au désarroi, Fanny dresse un état des lieux de la féminité, sans aigreur, ni imprécations. Venise, récit d'un corps chanté relève d’une catharsis dont le tonus n’exclut en rien la plus sensible des acuités.
11-Théâtre : 17h10, jusqu’au 21 juillet. Relâche le lundi.
Réservations : https://www.11avignon.com/programmation/spectacles/venise-recit-chante-d-un-corps
Photographie : Pauline Le Goff
Ressources Humaines
Élise Noiraud se partage entre ses seules en scène: Elise, triptyque autobiographique; et des propositions collectives axées sur le monde du travail. Après Les Fils de la terre, présenté en 2018 à Avignon, chronique du désarroi d’une famille d’agriculteurs. La metteure en scène examine à nouveau les interactions entre monde du travail et noyau familial.
Ressources Humaines est l’adaptation du film homonyme, réalisé en 2000 par Laurent Cantet (1961-2024). Diplômé d’une grande école, Franck effectue un stage dans l’usine où son père est salarié. Le jeune cadre se découvre transfuge, plus vraiment en phase avec le monde ouvrier et néanmoins circonspect avec les tâches qui lui sont confiées.
La proposition repose sur quelques tables, chaises, vêtements et avant tout sur le corps, l’énergie des sept interprètes qui virevoltent entre les personnages.
De ce tonique dépouillement, émergent les dilemmes et tragédies liées au démantèlement et au déclassement. Au delà de sa force dramatique, Ressources humaines salue l'oeuvre d'un cinéaste, résolu d'en finir une bonne fois pour toute avec les diktats compétitifs et la théorie du ruissellement.
11-Théâtre : 17H50, jusqu’au 21 juillet. Relâche le lundi.
Réservations : https://www.11avignon.com/accueil/focus-contenus/ressources-humaines
Photographies : Pauline Le Goff.
Les Valises Bleues
Un atelier d’artiste, sur le sol des esquisses et du papier froissé. Une femme franchit le seuil. Elle provoque le maître des lieux, jusqu’à le menacer. Ainsi débute Les Valises Bleues.
Pour sa nouvelle création, Gérard Vantaggioli réunit Stéphanie Lanier et Jean-Marc Catella, deux interprètes complices de longue date, pour une romance de complicité.
Il peint, elle écrit des chansons. Ils s’aiment, s’inspirent depuis longtemps. En butte à la routine, ils s’inventent un théâtre, se bricolent un cinéma.
Mais guette la page blanche et gare à l’écran blanc.
Les Valises bleues soumet les sens à l’épreuve du temps. La spirale de jeux de dupe renvoie au Limier, la pièce de Anthony Shaffer (1970), portée au cinéma, deux ans plus tard par par Joseph L. Mankiewicz.
Désir, communion, imagination, Gérard Vantaggioli plonge dans la sphère d’une intimité hermétique aux injonctions et à la bienséance.
Je t’aime encore, tu sais, je t’aime. Tel pourrait-être le sous titre de ce duo de désir et de chair qui distille un trouble revigorant.
Théâtre du Chien qui fume : 17H, jusqu’au 21 juillet. Relâche le mercredi.
Réservations : https://www.chienquifume.com/
PSG4EVER
Comment s’attacher à une équipe susceptible de se transcender sur un match mais incapable de tenir la distance ? Pourquoi défendre un club fondé par un couturier et une star de cinéma, renfloué ensuite par un état peu soucieux des droits de l’homme et la démocratie ?
Julien Prévost se pose la question, lui l’indécrottable supporter du Paris Saint- Germain. Il faut dire qu’au collège, accompagner le bon club facilite l’intégration. Et à la maison, le football reste l’un des rares sujets de conversation avec le père et le frangin.
Tout au long de PSG4EVER, l’acteur mouille le maillot, entremêle ses souvenirs avec l’histoire, les turpitudes d’une institution, la ferveur collective des supporters et les exploits des joueurs (il est vrai que Weah, Raï, Ginola.., taquinaient le ballon)
Chez Julien, les abrutis fanatiques restent hors champ, subsiste un attachement qui relie une famille, inscrit dans un groupe, scande une mémoire et ponctue une existence.
A la fin, le foot s’immisce dans une soirée qui supplante toutes les remontadas. PSG4EVER on adhère. Et puis, de par ici, parader pendant une heure avec sur le dos les couleurs du PSG, il fallait oser.
Villeneuve en scène-Ecole Montolivet : 18H30, jusqu’au 20 juillet.
Réservations : https://www.festivalvilleneuveenscene.com/programmation/psg4ever/
La Motivation
Alice Fage décroche un job au service DRH d’une grande société. L’outsider se fond dans le moule, Alice est corporate, cinq jours sur sept et le week-end, où une coach allumée façon World Company, la convainc des valeurs cardinales du labeur, de la famille et la flexibilité.
Lors d’un raout d’actionnaires, où est programmé un ballet de lapins (sic), Alice endosse la peluche puis éprouve quelques difficultés à s’en débarrasser.
Aurélia Tastet signe et joue La Motivation.
Verbe haut, corps délié, tonus inépuisable, la dame converse avec un logiciel, virevolte entre les personnages puis se fond dans un lapin chasseur et bien vivant. La satire iconoclaste verse alors dans une spirale intérieure où Lewis Caroll croise Franz Kafka, La Métamorphose s’invite au Pays des merveilles.
On arrête tout, on réfléchit et c’est pas triste. La phrase résonne au terme de ce seule en scène iconoclaste et engagé dans toutes les acceptions.
Villeneuve en scène, placé du cloître : 19H, jusqu’au 20 juillet. Relâche le 14.
Réservations : https://www.festivalvilleneuveenscene.com/
La chronique intégrale c'est par ici : https://www.michel-flandrin.fr/festival-d-avignon-2024/festival-d-avignon-2024-off/alice-et-le-lapin.htm
France
Stadium emmenés par Mohamed El Khatib et les supporters du Racing Club de Lens, PSG4EVER, actuellement à Villeneuve en scène ; sur diverses scènes le football devient source d’inspiration.
Dans France, Natasha Steck coache cinq gaillards, cinq joueurs-acteurs qui réaniment l’épopée de l’équipe de France Football 1998, Dirigé par un éducateur sportif, constitué de solides compétiteurs autour d’un Zizou d’exception, le groupe remporta sa première Coupe du monde.
Comment raconter une histoire que tout le monde connaît ? Comment transporter un match au plateau ? Natacha et sa team restituent l’épopée par des respirations polyphoniques, des envolées déclamatoires ou des percussions corporelles.
Au delà du parcours sportif, France restitue une parenthèse enchantée, où le triomphe d’une génération Black Blanc Beur ouvrait de multiples possibles.
Nostalgie, tonique, France chante le collectif, dont les vertus, en ces temps connectés, gagneraient à être extirpées de leur désuétude.
A feelgood show? What else?
Présence Pasteur : 20H05, jusqu’au 21 juillet. Relâche le mercredi.
Réservations :https://presence-pasteur.fr/
Photographie : Vincent Muller.
Roméo et Juliette
Sollicité par la Korea National University of Arts (K’ARTS) de Seoul, Alain Timar retraduit Roméo et Juliette. A cette occasion, le dramaturge propulse vers le futur la pièce de Shakespeare. Animée par quinze interprètes accompagnés d’un claviériste-chœur antique, le destin tragique des jeunes amants se détermine au sein d’une société dystopique où les sentiments sont hors ligne et les hommes et les femmes désormais séparés.
Sur un vaste tatami, telle une page blanche, des masses genrées dessinent des arabesques à la palette luxuriante. Cette nouvelle lecture d'un chef-d'oeuvre millénaire, devient une parabole futuriste qui titille avec panache le temps présent.
Théâtre des Halles : 21H30, jusqu’au 21 juillet. Relâche le mercredi.
Réservations : https://www.theatredeshalles.com/pieces/romeo-et-juliette/
Entretien avec Alain Timar c'est là : https://www.michel-flandrin.fr/festival-d-avignon-2024/festival-d-avignon-2024-off/verone-n-est-plus-en-italie.htm
Photographies : © HeeKyung Lee, Michel Flandrin.
YAAY
La terre d’Afrique se projette sur un écran. La toile devient une matrice de laquelle s’extirpe des membres, une tête, un buste.
YAAY s’ouvre sur la naissance (renaissance?) d’un corps androgyne qui se tend, s’incurve, s’altère en une majestueuse suite plastique .
Dans son nouveau solo, Abdou N’Gom honore ses racines sénégalaises. Le danseur célèbre la Terre-Mère. Les paysages du féminin se parent d’un hip-hop sculptural, véritable griffe de Mr Stylistik.
L’artiste travaille genres, cultures et traditions au fil de tableaux où l’énergie du corps s’associe à de subtiles compositions sonores et esthétiques.
YAAY distille un moment de grâce, de reconnaissance et de recueillement.
Théâtre Golovine : 12H15, jusqu’au 21 juillet. Relâche le lundi.
Réservations : https://www.theatre-golovine.com/festival-off-danse
Photographie : Christian de Héricourt.
Zoé
De l’enfance à la quarantaine, Zoé déroule un récit de vie, une histoire de famille, une affaire d’acteurs. Car Zoé est fille de comédiens, biberonnée à Shakespeare, Racine, Roxane et Cyrano.., sous fond d'éruptions domestiques et musicales bigger than life.
Car le paternel de Zoé est borderline-bipolaire. Résultat : sa fille alterne crises d’asthme et démangeaisons, dresse des listes et empile les consultations.
Comment vivre avec quelqu’un qui est malade ?
Là est la question qui sous-tend le texte écrit et mis en scène par Julie Timmerman. Celle-ci tient à distance les imprécations doloristes ou le règlement de compte acrimonieux, au profit d’une évocation en équilibre entre rancune et indulgence.
Si le théâtre peut rendre fou, il possède par ailleurs de séduisantes facultés de consolation.
Jusqu'au 21 juillet, 11H, La Factory-Théâtre de l'Oulle. Relâche le mardi.
A noter : Petite Zoé : le 9 juillet à 13h et le 16 juillet à 11h avec Julie Timmerman
L'article au complet c'est par ici : https://www.michel-flandrin.fr/festival-d-avignon-2024/festival-d-avignon-2024-off/parents-terribles2.htm
Photographie : Pascal Gely.
Tendre Carcasse
Ils se prénomment Arthur, Matthis, Elisabeth, Agathe. Ils sont danseurs puisqu'ils occupent le plateau du Centre de Développement Chorégraphique National d'Avignon. Les unes et les autres se racontent à travers les rapports à leur corps. Il est question de points noirs, de phobie du poil, de crainte de la calvitie, de doigts de pied grenouilles, de profil de singe.
Progressivement, le quatuor joint le geste à la parole. Le jeune chœur se met en mouvement pour un trajet de vie. Le parcours reste arrimé à l'enveloppe qui se transforme, aux complexes qui s'accentuent ou s'estompent au gré de la puberté.
Comme son titre l'indique: Tendre Carcasse relève de l'autofiction (les propos sont issus d'interviews réalisées, au préalable avec les interprètes) et du chemin d'accomplissement. Arthur Pérole et ses partenaires mettent en danse les combats ou petits arrangements face aux préjugés, aux injonctions extérieures, au névroses intimes. Du geste ébauché à la transe collective, la danse est distinguée, tonique.
Vers la fin, la musique s'arrête net. Ne reste que les souffles, les respirations, le ruissellement des transpirations. A l'évidence, Les Tendres Carcasses se sont forgées un coffre blindé.
Théâtre des Hivernales-CDCN d'Avignon : 17H, jusqu'au 16 juillet.
Réservations : https://www.hivernales-avignon.com/spectacle/tendre-carcasse
Photographie : Nina Flore Hernadez.
A l'ombre du réverbère
Redwane Rajel est comédien. Il a travaillé Marcel Pagnol avec Joël Pommerat, Sous la direction d'Olivier Py et Enzo Verdet, il servit Sophocle et Shakespeare au Festival d''Avignon.
Dans des vies antérieures, Redwane fut militaire de carrière, boxeur professionnel, détenu de maison d'arrêt, abonné à l'isolement.
Enserré dans un décor qui évoque l'exiguïté d'une salle d'interrogatoire, la promiscuité d'une cellule ou l'impasse d'un enfermement, Redwane retrace sa biographie cabossée. En arrière plan se distingue l'aveuglement imbécile d'une hiérarchie, la cécité paresseuse d'une administration.
Certes le bonhomme nourrit un tempérament bagarreur qu'il sublime, pour le meilleur, en rage de vivre, puis en inspiration. Chez Redwane la découverte et la pratique du théâtre deviennent une incandescente épiphanie où un rai de lumière, une brise, une odeur, chavirent un destin.
A l'ombre du réverbère, s'épanouit une nature, se révèle un acteur, doublé (il le concède lui-même) d'un sacré baratineur.
Théâtre Transversal : 21H30, jusqu'au 21 juillet. Relâche le mardi.
Réservations : https://theatretransversal.com/
Photographies : Claire Gaby
Je suis
C’est la mauvaise fée du monde, c’est la sorcière du monde, c’est la bêtise. Il n’y a pas de gens méchants. Il y a des gens bêtes. Mais ce n’est pas de leur faute. Et il y a des gens qui ont peur. Ça c’est de leur faute.
Cette définition, elle sonne, à travers la voix de Jacques Brel dans un passage de #Bêtises. Présentée lors du Festival d'Avignon 2023 la pièce dresse un virulent réquisitoire à l'encontre des mirages connectés qui confisquent l'imaginaire, annihilent le libre arbitre.
La citation est à nouveau incluse dans Je suis. Brel y côtoie quelques leaders extrémistes mais aussi Fabrice Luchini et même Jacques Martin. Pensée pour la rue, la création de la compagnie Evolves passe au plateau, Aux côté de Iris Picard et Andrien Tan, Valentin et Sarah Genin, prodiguent un hip hop vigoureux où l'engament rivalise avec la cohésion.
Du drapeau à la couleur de peau, en passant par les injonctions morphologiques, le quatuor travaille l'identité, mitraille les préjugés, exalte les différences.
C'est concis, tonique. C'est patriote. De l'Evolves dans le geste en quelque sorte.
Factory-Théâtre de l'Oulle : 10H, jusqu'au 21 juillet. Relâche le mardi.
Réservations : https://www.theatredeloulle.com/